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Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/38

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ADMINISTRATION, 51-58.

ganisation en substituant, par la loi du 28 pluviôse an VIII (17 fév. 1800), les préfets aux directoires des départements. « Administrer, dit alors le conseiller d’État Rœderer dans son rapport, est le fait d’un seul homme, et juger le fait de plusieurs. »

Il maintint et développa même, peut-être trop selon quelques auteurs, la centralisation qui, surtout depuis 1789, est l’un des caractères distinctifs de l’administration française[1]. Il constitua cette administration d’une manière si rationnelle, que, dépositaire intelligente des traditions accumulées par la pratique de nombreuses années, instrument puissant et en même temps docile aux impulsions du Gouvernement, elle est toujours prête à indiquer les améliorations suggérées par l’expérience et à les appliquer, si tel est le désir du ministre qui la dirige. Elle prendra rarement l’initiative des progrès, elle n’en a pas la mission ; d’ailleurs elle n’en aurait que la peine et jamais la récompense, mais il faut reléguer parmi les fables « la sourde résistance des bureaux ». Elle ne résiste jamais à un ordre, pas même à la volonté présumée du ministre.

51. Actuellement l’autorité administrative est représentée à tous les degrés hiérarchiques par un fonctionnaire unique. Un ministre pour chaque branche de l’administration ; un préfet pour chaque département, un sous-préfet par arrondissement, un maire par commune. Chacun de ces fonctionnaires est entouré de conseils, dont les avis sont tantôt nécessaires, tantôt facultatifs. Enfin, un système de juridiction complète l’organisation administrative, qui peut être résumée en trois mots : action, conseil, jugement. L’action est confiée à des agents, ce mot pris dans un sens très-large ; le conseil à des assemblées portant le nom de conseil, comité, chambre ; les jugements à des tribunaux administratifs. Énonçons brièvement les attributions de ces diverses autorités.

Sect. 2. — Agents.

52. L’autorité administrative, créée par les lois ou les constitutions parce qu’aucun grand État ne peut s’en passer, émane du chef de l’État, et elle est souvent exercée par lui. Son intervention est indispensable dans un assez grand nombre d’actes, dont l’énumération serait impossible ici. (Voy. Décret, Règlement d’administration publique.) Elle est motivée, soit par une délégation spéciale de la loi, soit par l’importance de la matière qu’il s’agit de régler. Ces actes embrassent une certaine généralité dans leur objet, s’étendent dans l’avenir par leur prévoyance et imposent des obligations ou des restrictions soit à l’ensemble des Français, soit à une classe de citoyens. Généralement ces actes doivent être précédés d’une délibération du Conseil d’État.

53. Mais il est aussi des décisions prises sur le simple rapport d’un ministre elles sont généralement relatives à l’organisation d’un service public, à des intérêts individuels, à la nomination de fonctionnaires et de juges, à la concession des insignes de la Légion d’honneur, etc.

Tous les actes du chef de l’État doivent être contre-signés par un ministre et insérés au Journal officiel et au Bulletin des Lois.

art. 1. — ministres.

54. Sous l’autorité immédiate du chef de l’État, les ministres sont les chefs de l’administration, chacun dans la branche dont il porte le titre.

55. Les pouvoirs et les attributions des ministres sont afférents à leur fonction ou au département dont ils sont chargés. Les premiers sont généraux, les seconds spéciaux.

Les pouvoirs et attributions générales sont :

Le contre-seing des actes du chef de l’État relatifs aux attributions de leurs ministères respectifs. De là vient le titre de secrétaire d’État ;

L’ordonnancement des dépenses publiques ;

La mise à exécution des lois et décrets ou ordonnances par des règlements, des instructions, des interprétations ;

La nomination d’un grand nombre de leurs subordonnés et agents ;

Le contrôle des actes des autorités inférieures qu’ils peuvent généralement confirmer ou réformer ;

La direction des services publics qui leur sont confiés, et la préparation des mesures, décisions, règlements nécessaires ;

L’autorité des ministres s’exerce dans toute l’étendue de la France, et même hors de ses frontières, si les nécessités du service l’exigent.

56. Le nombre des départements ministériels est fixé par le chef de l’État et peut être modifié selon la convenance des services publics ou selon les exigences de la politique. Il y a quelquefois (selon les régimes) des ministres sans portefeuille ; ils ne sont pas secrétaires d’État.

On a souvent nommé des sous-secrétaires d’État pour seconder les ministres. Ces derniers leur délèguent alors une partie de leurs fonctions administratives. Les sous-secrétaires d’État font généralement (comme les ministres sous la plupart des régimes) partie des assemblées législatives.

art. 2. — préfets.

57. Le préfet administre le département territorial. Il y est à la fois l’organe du Gouvernement et le représentant des intérêts départementaux.

Nommé par le chef de l’État sur la proposition du ministre de l’intérieur, il est l’agent de tous les ministres. Son autorité ne se renferme pas dans une branche spéciale des services publics, mais elle est restreinte aux limites du département qu’il administre.

58. Comme organe ou représentant du Gouvernement, il exerce une autorité qui lui est propre et qui lui est déléguée, soit directement par une loi, soit par le chef du Gouvernement.

Il peut prendre des arrêtés et prescrire des mesures obligatoires pour la totalité ou partie des habitants de son département ; il nomme la plupart des fonctionnaires ou agents qui lui sont subordonnés ; il en révoque quelques-uns et en suspend d’autres, sauf à en référer à l’autorité supérieure. Il est le chef de la police dans son département et peut, au besoin, requérir la force publique. Il rend exécutoires les rôles des contri-

  1. La centralisation a donné lieu de bien vives attaques, et, en effet, elle n’est pas sans inconvénients, mais elle présente aussi d’importants avantages (voy. Centralisation) ; il s’agirait de trouver la juste mesure pour satisfaire à tous les intérêts. En attendant, de nombreuses mesures ont été prises pour en desserrer les mailles.