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Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/587

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CONFLIT, 169-172

glement dont il s’agit. Dans la seconde espèce (2 avril 1852), il ne s’est pas borné à déclarer le conflit non avenu, par suite de la législation nouvelle qui attribuait désormais à l’autorité judiciaire la compétence que ce conflit avait revendiquée pour l’administration ; il a, de plus, par une disposition formelle renvoyé le sieur Mestre devant le tribunal compétent pour prononcer sur les poursuites dirigées contre lui. Des circonstances particulières peuvent expliquer ces deux déroga,tions à une règle, qui demeure d’ailleurs constante.

169. En troisième lieu, enfin, le conflit peut être confirmé pour partie seulement et annulé pour le surplus. Le Conseil d’État avait adopté, dans ce cas, deux rédactions différentes tantôt il confirmait expressément le conflit sur tels chefs déterminés et l’annulait expressément pour le surplus ; tantôt il se contentait de le confirmer sur certains chefs, sans ajouter qu’il l’annulait pour le surplus. Au fond, le résultat est le même car, même dans ce dernier cas, les actes et procédures judiciaires ne sont déclarés non avenus qu’en ce qu’ils ont de contraire à la confirmation partielle du conflit l’autorité judiciaire demeure donc également compétente, dans l’une et lautre hypothèse, pour connattre des chefs à l’égard desquels le conflit n’est pas explicitement confirmé. Mais la première forme a l’avantage considérable de la netteté et de la clarté il serait à désirer qu’elle obtint toujours la préférence. Sous ne saurions, du reste, indiquer les raisons, s il en existe, qui ont déterminé quelquefois à choisir la seconde il n’y a là peut-être que des hasards ou des accidents de rédaction.

Du reste, nous n’avons rien à ajouter, sur cette troisième alternative, aux observations que nous avons présentées sur les deux premières, et qu il nous paraît facile d’y approprier partiellement.

CHAP. II. DU CONFLIT NÉGATIF.
Sect. 1. Des conditions de l’existence du conflit négatif.

170. « Le conflit négatif est, en quelque sorte, la contre-partie du conflit positif dans tous les deux, l’autorité administrative et l’autorité judiciaire se trouvent en présence, avec cette différence que, dans un cas, chacune de ces autorités veut s’attribuer la connaissance d’une même affaire, tandis que, dans autre, elles se déclarent respectivement incompétentes. » (M. Boulatignier, p. 504).

La législation sur les conflits négatifs a été longtemps réduite à l’art. 8 de l’ordonnance du 12 décembre 1821, ainsi conçu: « En ce qui concerne les règlements de juges entre l’administration et les tribunaux, qualifiés de conflits négatifs, il y sera procédé comme par le passé. »

Il faut yajouter aujourd’hui le chapitre III (art. 17 à 24) du règlement du 26 octobre 1849, relatif aux formes de procéder devant le premier Tribunal des conflits, et qui a été remis en vigueur par l’art. 27 de la loi du 24 mai 1872[1].

171. Le conflit négatif constitue une interruption du cours de la justice ; mais cette interruption ne provient pas d’un empiétement que le pouvoir judiciaire commettrait sur le pouvoir administratif et de la revendication élevée par ce dernier elle provient de ce que l’une et l’autre autorité, saisies du même litige, se sont également déclarées incompétentes pour en connaître.

De là il suit d’abord que le conflit négatif n’existe, ne se produit qu’entre deux autorités, l’une de l’ordre administratif, l’autre de l’ordre judiciaire, et que, si deux autorités du même ordre se déclaraient successivement incompétentes pour statuer sur la même question, il y aurait lieu, non pas à suivre la voie spéciale du conflit négatif, mais à faire fixer la compétence dans les formes propres, selon les cas, aux matières judiciaires ou aux matières administratives. Nous n’avons point à exposer ici ces formes et ces règles.

172. De là il suit encore qu’il faut que les deux autorités aient été saisies du même litige et qu’elles s’en soient l’une et l’autre dessaisies.

Il n’y aurait pas conflit négatif, par exemple, si les deux déclarations successives d’incompétence n’étaient pas intervenues entre les mêmes parties (18 févr. 1858), ou bien si les deux autorités n’avaient pas eu à statuer sur le même litige. (9 déc. 1858 ; 18 déc. 1862.)

On comprend, du reste, que, de la part de l’autorité judiciaire, il ne peut guère s’élever de difficulté sur la question de savoir si elle a été saisie d’une contestation et si elle y a statué ; c’est là un point de fait qui ne saurait, en général, donner lieu à aucun doute. Mais il n’en est pas absolument de même de la part de l’autorité administrative, dont les actes, sous des formes semblables, ont parfois un caractère différent et peuvent ainsi, selon les cas, constituer ou ne pas constituer des décisions. Ainsi, par exemple, un conseil de préfecture accorde à une commune l’autorisation d’in-

  1. Nous reproduisons les dispositions de ce chapitre, relatif aux conflits d’attributions négatifs :

    « Art. — 17. Lorsque l’autorité administrative et l’autorité judiciaire se sont respectivement déclarées incompétentes sur la même question, le recours devant le Tribunal des conflits, pour faire régler la compétence, est exercé directement par les parties intéressées. Il est formé par requête, signée d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation.

    « Art. 18. Lorsque l’affaire intéresse directement l’État, le recours peut être formé par le ministre dans les attributions duquel se trouve placé le service public que l’affaire concerne.

    « Art. 19. Lorsque la déclaration d’incompétence émane d’une part de l’autorité administrative, de l’autre d’un tribunal statuant en matière de simple police ou de police correctionnelle, le recours peut en outre être formé par le ministre de la justice.

    « Art. 20. Le recours doit être communiqué aux parties intéressées.

    « Art. 21. Lorsque le recours est formé par des particuliers, l’ordonnance de soit communiqué, rendue par le ministre de la justice, président du Tribunal des conflits, doit être signifiée, par les voies de droit, dans le délai d’un mois. Ceux qui demeurent hors de la France continentale ont, outre le délai d’un mois, celui qui est réglé par l’art. 73 du Code de procédure civile.

    « Art. 22. Lorsque le recours est formé par un ministre, il en est, dans le même délai, donné avis à la partie intéressée par la voie administrative. Dans les affaires qui intéressent l’État directement, si le recours est formé par la partie adverse, le ministre de la justice est chargé d’assurer la communication du recours au ministre que l’affaire concerne.

    « Art. 23. La partie à laquelle la notification aura été faite, est tenue, si elle réside sur le territoire continental, de répondre et de fournir ses défenses dans le délai d’un mois à partir de la notification. À l’égard des colonies et des pays étrangers, les délais seront réglés, ainsi qu’il appartiendra par l’ordonnance de soit communiqué.

    « Art. 24 Les parties intéressées peuvent prendre par elles-mêmes ou par leurs avocats, communication des productions au secrétariat, sans déplacement et dans le délai déterminé par le rapporteur. »