Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
59
ALGÉRIE, 17-26.

17. Les recettes du budget de l’Algérie consistent en produits ayant un caractère général, tels que contributions directes, enregistrement et timbre, domaines, forêts, douanes et sels, contributions indirectes, postes et télégraphes, impôts arabes, etc., et en produits divers tels que ceux des redevances sur les mines, des poids et mesures, etc., des prises faites sur l’ennemi, contributions extraordinaires de guerre. — Ces revenus sont compris au budget général des voies et moyens sous le titre : Produits et revenus de l’Algérie. (Ord. 17 janvier 1845, art. 11 ; D. 26 décembre 1864, art. 3 ; D. 6 mai 1871, art. 2.)

18. Les dépenses du même budget ont été déterminées par l’ordonnance du 17 janvier 1845 (tableau B). Les modifications successives de l’organisation ont entraîné des changements correspondants pour cette nomenclature qui comprend douze chapitres au budget de 1875. — Les prisons et les services pénitentiaires qui faisaient autrefois l’objet du chapitre 5 du budget de l’Algérie, ont été placés sous l’autorité directe du ministre de l’intérieur par un décret du 18 décembre 1874.

19. Nous allons, en suivant l’ordre adopté dans le budget, pénétrer dans le détail de l’administration locale et des services publics ; mais avant de quitter ce qui regarde le gouvernement proprement dit, nous voudrions dire quelques mots du régime législatif, encore fort incertain, de l’Algérie.

20. Ainsi qu’il a été énoncé plus haut, d’après les ordonnances des 22 juillet 1834 et 26 septembre 1842, et de l’assentiment au moins tacite des assemblées délibérantes, le pouvoir législatif, en Algérie, n’a cessé d’être exercé par le chef de l’État qui a usé de ce droit soit par des prescriptions directes, soit en promulguant, en tout ou en partie, les lois, ordonnances ou décrets déjà en vigueur dans la métropole.

21. Toutefois, on n’a jamais admis que l’Algérie fût régie exclusivement par les textes expressément édictés ou promulgués. Ainsi que l’a exprimé la Cour de cassation, dans un arrêt du 15 juillet 1868, « la conquête et l’occupation permanente de l’Algérie, devenue territoire français, y ont virtuellement et de plein droit rendu exécutoires les lois d’ordre général précédemment existantes en France, dans la mesure où ces lois pourraient recevoir application sur le sol algérien. » Par la force des choses, la législation générale de la France a suivi en Algérie, terre française (Constitution du 4 novembre 1848, art. 109), les Français qui ont été s’y fixer ; mais il reste à déterminer, pour chaque loi spéciale, la mesure dans laquelle elle peut recevoir application sur le sol algérien et cette détermination n’est pas exempte de difficulté.

22. M. de Ménerville, dans son Dictionnaire de la législation algérienne, 3e vol. (Vo Promulgation), distingue entre les lois antérieures au 22 juillet 1834 et les lois postérieures. Pour les premières, il pense qu’une promulgation ne deviendrait nécessaire que si le gouvernement entendait restreindre le droit général ou y apporter des modifications. Les lois postérieures à 1834, qui n’ont eu pour objet que de modifier ou abroger une loi préexistante et déjà exécutoire en Algérie, lui paraissent exécutoires de plein droit, sauf promulgation spéciale, et cette opinion nous semble au-dessus de la controverse ; quant aux lois postérieures à 1834 qui sont introductives d’un droit nouveau, une promulgation spéciale est, selon lui, indispensable. C’est aussi ce que la Cour de cassation a décidé dans un arrêt du 28 janvier 1874.

23. « Il est de principe, dit cet arrêt, que, par l’effet de l’ordonnance royale du 22 juillet 1834, qui a placé l’Algérie sous le régime particulier des ordonnances, les lois de la métropole n’y sont devenues exécutoires depuis lors qu’en vertu d’une promulgation spéciale ; même pour la période antérieure, elles n’y ont été applicables à l’origine que facultativement, en laissant, d’ailleurs, aux indigènes entre eux, leur justice et leurs coutumes ; pour la période postérieure, la nécessité de cette promulgation a toujours été maintenue en thèse générale, afin de pouvoir régler constamment, dans la colonie, le progrès des institutions sur le progrès des habitudes et des mœurs. »

24. Quelle que soit l’autorité de ces règles, on a vu appliquer en Algérie, sans promulgation spéciale, la loi du 12 juillet 1865 sur les chemins de fer d’intérêt local. (Déc. 29 avril 1874, relatif au chemin de Bone à Guelma.) Les conseils généraux d’Algérie, avec l’assentiment au moins tacite du Gouvernement, ont appliqué, quoique non promulguée, la loi du 10 août 1871, et désigné, comme les conseils généraux de France, des commissions départementales qui n’ont jamais vu contester la légalité de leur action.

CHAP. II. — ADMINISTRATION PROVINCIALE ET DÉPARTEMENTALE.

Sect. 1. — Généralités.

25. Jusqu’aux derniers temps de l’Empire, dans chaque province, l’administration générale du territoire civil et du territoire militaire était confiée à un général de division qui prenait le titre de général commandant la province. (Déc. 7 juillet 1864, art. 13.) C’était sous l’autorité de ce général que le préfet administrait le territoire civil de chaque province. (Ibid., art. 17.) Le préfet, d’ailleurs, avait sous ses ordres les chefs des différents services civils et financiers dont l’action s’étendait sur les deux territoires. Il surveillait ces services, soit en vertu de son autorité directe dans le territoire civil, soit dans le territoire militaire, en vertu d’une délégation du général commandant la province qui, en fait, était toujours donnée. (Ibid., art. 18.)

26. Cette subordination des préfets aux généraux avait soulevé de vives répugnances qui s’étaient manifestées notamment au cours d’une enquête dirigée par M. le comte Lehon. Pour donner satisfaction, à cet égard, à l’opinion publique et « en attendant les mesures qui devaient fixer le nouveau régime administratif de l’Algérie », le décret du 31 mai 1870 avait décidé que les préfets exerceraient dans les départements la plénitude des pouvoirs administratifs et correspondraient directement avec le gouverneur général, sans relever d’aucune autre autorité (art. 1er). Les pouvoirs administratifs des généraux commandant les provinces étaient limités aux territoires militaires, et ces généraux devaient exercer désormais, dans ces territoires, toutes les attributions dévolues à l’au-