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1092 INDEMNITÉ, ETC., 2-8. INDEMNITÉ, ETC., 9-14. . La défense du pays, nécessité suprême, exige des dérogations fréquentes au principe, que toutes nos constitutions ont proclamé et garanti, de l’inviolabilité de la propriété privée. . C’est autour des places fortes que ces dérogations sont les plus onéreuses. Les servitudes défensives dont sont grevées les propriétés environnantes et qui consistent dans des prohibitions de construire ou de réparer, ne donnent lieu à aucune indemnité. C’est l’application de la règle générale d’après laquelle une indemnité n’est jamais due pour l’établissement d’une servitude d’utilité publique. (Voy. Servitudes défensives militaires.) . En état de paix, les garanties dont la propriété est entourée sont absolues. Y a-t-il dépossession ou démolition de constructions préexistantes au classement de la place dans l’intérieur des zones,ou de constructions quelconques en dehors de ces zones, c’est la loi du 3 mai 1841 qui est applicable c’est l’expropriation ordinaire. Y a-t-il occupation temporaire, on applique la loi du 30 mars 1831 ou du 16 septembre 1807, suivant que l’occupation a pour but des travaux de défense ou des fouilles, dépôts ou extractions de matériaux. Dans aucun de ces cas, le droit à indemnité n’est contestable. (Art. 35 à 38 du décret du 10 aoitt 1853.)

. L’état de guerre ne permet pas d’employer ces formalités tutélaires, mais lentes, des lois que nous venons de citer, et nécessite des règles exceptionnelles. D’après l’art. 38 du décret de 1853, qui n’est d’ailleurs que la reproduction des principes consacrés dans les lois des 10 juillet 1791 17 juillet 1819, et 10 juillet 1851 les inondations et les occupations de terrains nécessaires à la défense d’une place ne peuvent être ordonnées que par décret ou, en cas d urgence, par le gouverneur ou le commandant de la place, après avis du conseil de défense ; l’indemnité est réglée dès que l’occupation a cessé. Il en est de même pour toute destruction ou détérioration de constructions situées dans les zones de servitudes. Seulement, les propriétaires n’ont droit à une indemnité qu’autant qu’ils justifient que les constructions existaient avant que le sol fût soumis aux servitudes défensives.

. C’est en somme accorder une indemnité 1° pour tout dommage causé aux propriétés situées en dehors des zones 2° pour tout dommage causé aux constructions situées dans ces zones, à moins qu’elles n’aient été élevées par tolérance depuis la création de la place.

. L’état de siège est fictif ou réel. Fictif, il a surtout un caractère politique ; il peut atteindre un département tout entier et ne supposer ni la présence ni l’approche de l’ennemi. Il ne modifie en rien les règles que nous venons d’énoncer. [Art. 1 1 de la loi du 9 août 1849.) [Voy. État de paix.] 8. II n’en est pas de même de l’état de siège réel, qui ne concerne que les places fortes ou les postes militaires et en suppose l’investissement. Aucune indemnité n’est due aux propriétaires qui sont victimes des mesures prises par l’autorité militaire dans ces circonstances. Ceci résulte de

art. 39 du décret de 1853, dont certains auteurs 

ont contesté la légalité, parce qu’ils n’ont pas reconnu qu’il ne s appliquait qu’à l’état de siège réel, et n’était dès lors qu’une conséquence du principe général, d’après lequel le fait de guerre accidentel, à 1 inverse de la mesure précautionnelle de défense, n ouvre jamais droit à indemnité. 9. Le principe de non-indemnité n’est pas particulier aux dommages causés pour la défense d’une place assiégée ; il s’applique à tout dommage résultant d’un fait de guerre commis en rase campagne par un corps d’armée ou un détachement en face de l’ennemi.

. Quelle est l’autorité chargée de statuer sur les demandes en indemnité ? L’art. 15 de la loi du 17 juillet 1819 a déclaré la législation sur l’expropriation applicable aux principaux cas où une indemnité est accordée en cas de guerre. La juridiction compétente est donc aujourd’hui le jury, à moins que des textes spéciaux n’aient édicté d’autres règles,

. Mais des questions préjudicielles peuvent s’élever une place est-elle ou non classée comme place de guerre ? Les actes de l’autorité militaire sont-ils des actes volontaires et réfléchis, ou des faits de guerre accidentels ? 11 ne saurait être douteux que ces questions, portant sur Tinterprétation d’un acte du pouvoir exécutif, sur l’appréciation de mesures prises par l’autorité militaire n’appartiennent exclusivement à l’autorité administrative, au Conseil d’État. . Parmi les lois votées par l’Assemblée nationale, une seule doit être signalée ici c’est la loi du 28 juillet 1874. Elle concerne spécialement les personnes qui ont éprouvé préjudice lors des destructions opérées par le génie militaire pour les besoins de la défense nationale. Un dédommagement leur a été alloué, sauf à celles 1° qui n’ont pas renoncé à toute action devant les tribunaux judiciaires et administratifs 2° qui n’ont pas adressé ou renouvelé leur demande à l’administration dans certains délais ; 3" qui avaient souscrit un engagement de démolir à première réquisition ou dont les immeubles avaient été construits en contravention aux lois. Une commission a été chargée d’examiner toutes les réclamations et d’arrCtersouverainementl’indemnité de chacun.

CHAP. II. DOMMAGES CAUSÉS PAR L’ENNEMI. 13. Lorsqu’un dommage est la conséquence des dévastations commises par l’ennemi, les propriétaires qui l’ont supporté méritent assurément toute la bienveillance de l’État. Mais, d’après la législation en vigueur, ils n’ont aucune action contre lui, qui n’a contracté vis-à-vis d’eux aucune dette. L’application d’un système contraire aurait pour l’État des conséquences trop onéreuses obligé d’indemniser tous ceux qui ont eu à souffrir de la présence de l’ennemi, il aurait à supporter le poids d’une responsabilité sans limites qui épuiserait ses finances. D ailleurs, diton, les déprédations de l’ennemi ne seraient-elles pas plus nombreuses s’il savait que la nation doit rendre indemnes ceux de ses membres qui les ont subies ?

. Mais si l’État ne doit légalement aucune indemnité pour dommages causés par l’ennemi, il CHAP. I. DCMMAGES RÉSULTANT DE MESURES DE DÉFENSE.