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MAJORITÉS, MINORITÉS. MALTE, GOZO ET COMINO.


faire ; mais elle doit l’hommage du respect à la liberté de chacun et, suivant la philosophie d’Aristote comme suivant la droite raison, cette réserve de liberté individuelle, que ne saurait confisquer ie pacte social, est trop considérable pour qu’aucun genre d’oppression puisse jamais prendre les grands airs d’une légitime autorité. Mais quel que soit encore le crédit d’Aristote, il ne sufEt plus, pour convaincre la diversité des esprits, de démontrer une proposition de l’ordre politique suivant la méthode des philosophes. Beaucoup de gens sont en défiance à l’égard de ce genre de démonstration, et c’est à l’histoire qu’ils s’adressent quand ils veulent se former une opinion, même sur les devoirs et les droits réciproques du citoyen et de l’État. Dans l’histoire, tes minorités proposent, les majorités consacrent. A quelques hommes mieux doués que les autres, ou que des circonstances plus favorables ont particulièrement éclairés, a toujours appartenu l’initiative des réformes, des progrès jamais la lumière ne s’est soudainement faite pour la pluralité des consciences. Attribuez donc à la majorité le droit d’opprimer la minorité ; tout progrès s’arrête, et bientôt le dernier symptôme de la vie sociale s’est évanoui. Ainsi la vigilante poursuite de l’ordre par la voie de l’oppression est la recherche de la mort, et non pas d’une mort tranquille, mais d’une mort convulsive le supplice de l’oppression est de ne jamais jouir de ce repos auquel elle se résigne, non sans remords, à tout sacrifier.

Il y a dans l’histoire des antiques cités quelques exemples de ce suicide. Mais le plus souvent il n’arrive pas à fin. Il est, en effet, bien dimcile à la plus sagace, à la plus atroce tyrannie de comprimer la minorité suspecte jusqu’à l’anéantir. Elle peut lui ravir ses droits sociaux ; elle peut lui défendre toute manifestation publique de ses doctrines ou de ses griefs. Mais que de chemins secrets se fera l’industrie de la minorité pour arriver jusqu’au trônesuperbe de son intraitable ennemiel Cette minorité représentait d’abord une simple opinion, une opinion sage ou folle, qui devait peut-être échouer à l’écueil d’une libre controverse depuis qu’ouraproserite, elle représente de plus la justice. Ne l’a-t-on pas d’ailleurs autorisée à tout entreprendre, même par des moyens iniques, en usant contre elle de toutes les armes de l’iniquité ? Elle revendiquait la justice : on ne Fa pas écoutée. Encore un peu de temps et elle s’appellera la vengeance 1 C’est ainsi que les révolutions se préparent et s’accomplissent dans l’histoire. Reconnaître et respecter le droit des minorités, c’est prévenir les révolutions, crises douloureuses durant lesquelles les minorités victorieuses dépassent presque toujours le but qu’elles voulaient atteindre, et suscitent elles-mêmes les plus funestes réactions.

Quel beau spectacle nous of&e, au contraire, le jeu régulier des institutions libres, quand tons les droits sont observés 1 la majorité la haute main dans les affaires de l’État, le gouvernement de tons ses privilèges la minorité, persuadée qu’elle doit tôt ou tard parvenir à cette prépondérance, s’emploie de tous ses efforts à hâter le succès de sa cause ; mais avec la liberté de parler, d’écrire, de former des assemblées, elle ne se sent jamais entraînée à franchir la limite d’une censure légale. Attentif à ses discours, lecteur avide de ses écrits, le public, qu’elle avait d’abord trouvé contraire, lui devient peu à peu favorable, et déjà l’on peut soupçonner que la minorité de la veille est la majorité du jour. Arrive enfin l’heure assignée par la Constitution à l’ouverture d’autres comices l’épreuve se fait, elle est faite, le gouvernement passe en des mains nouvelles, et un grand changement s’est accompli sans troubles, sans meurtre, sans larmes. Les vaincus eux-mêmes descendent les degrés du pouvoir avec une sérénité de visage qui marque leur déférence à la volonté du peuple souverain ! Ainsi l’expérience confirme la doctrine ainsi les leçons de l’histoire et les arguments de la philosophie s’accordent à nous enseigner quelles sont les obligations mutuelles des majorités et des minorités dans un État libre. R. HADMAU.

ConrA]tEZ Représentation nationale, Minorités. MALTE, GOZO ET COMINO. En 1798, la fortune de la guerre donna ces trois iles a l’Angleterre. Les traités de 1815 lui enmaintinrent la possession ; leur superficie est de 115 milles carrés. En 1861, époque du dernier recensement, leur population civile était de 134,055 habitants, dont 2,226 étrangers.

La législation civile est restée à peu près ce qu’elle était au moment où les Anglais prirent possession de l’Ile ; il n’y a été fait que trèspeu de changements. En 1829, une innovation très-importante a été faite dans la législation criminelle par l’introduction du jury. Pendant quelques années on n’eut pas trop lieu de s’en féliciter. De temps à autre le jury, faute de fermeté, laissait impunis des crimes énormes ; mais à la longue ce mode d’administration de la justice est arrivé à bien fonctionner. En 1838, sans accorder aux habitants une liberté politique complète, on leur donna la liberté de la presse. Jusqu’à présent, le gouvernement anglais et la population maltaise n’ont eu qu’à se féliciter de cette mesure. La gestion des atTaires locales et municipales est entre les mains d’un conseil dont la moitié est choisie à l’élection. ABn de donner aux habitants les moyens de faire connaître leurs désirs, on a établi plusieurs comités consultatifs dont les membres se renouvellent chaque annéè par série.

Le revenu public est assis en grande partie sur les droits de douane ; il a toujours été en augmentant de 1838 à 1856, oùil atteint 144,795 liv. st., les dépenses n’étant que de 129,776 liv. st. De 1856 à 1866 les recettes se sont constamment accrues et sont parvenues au chiffre de 196,459, auquel correspondait un chiffre de 185,449 liv. st. En 1870, l’équilibre était rompu au détriment des recettes, qui étaient fort inférieures aux dépenses, les recettes étant de