Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/119

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des Goncourt, ah ! ce style qui « rend l’âme des paysages », et qui « attrape le mouvement dans la couleur », voilà le Régent de la Couronne esthétique de cet ingrat dix-neuvième siècle qui n’a pas encore décidé que tout son marécage littéraire devait s’incliner comme un seul roseau devant ce rouvre sourcilleux.

Il est aimé pourtant, le vieux dindon, il est adoré même d’un grand nombre, les femmes lui envoient de confidentiels petits papiers, il a une école, il a une église, il est le Lama vénéré de force bonzes, mais enfin, l’univers n’est pas à ses pieds et il n’arrive pas à dissimuler que cela lui paraît le comble de l’injustice.

« Petite Chérie, gémissait-il, il y a six mois à peine, pauvre dernier volume du dernier des Goncourt, va où sont allés tous tes aînés, depuis les Hommes de lettres jusqu’à La Faustin, va t’exposer aux mépris, aux dédains, aux ironies, aux injures, aux insultes, dont le labeur obstiné de son auteur, sa vieillesse, les tristesses de sa vie solitaire ne le défendaient pas encore hier et qui, cependant, lui laissaient entière, malgré tout et tous, une confiance à la Stendhal dans le siècle qui va venir. »

Le siècle qui va venir aura peut-être d’autres affaires et je ne conseillerais pas à M. Edmond d’y compter beaucoup. Tout être créé doit obéir à sa nature ou crever, et si le genre humain doit continuer de vivre, il retournera nécessairement à la Pensée et ne verra même pas les acépha-