Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

être aimés et qui ont sagement renoncé, depuis longtemps, à tout juvénile esprit de conquêtes. Ils sont entre eux et Dieu les bénit. Cela répond à tous les besoins de rédemption et d’apostolat.

Mais un homme tel que Barbey d’Aurevilly les embarrasse et les met dans de très-petits souliers. Il est absolument avec eux, respectueux pour eux, même, ce qui me paraît héroïque. Il professe, dans tout ce qu’il écrit, le catéchisme le plus irréprochable et il a toujours pris à son compte les querelles historiques ou philosophiques suscitées à leur coma. Impossible, par conséquent, de le déporter ouvertement, en compagnie des hérésiarques et des infidèles, dans l’inclémente Calédonie de leurs anathèmes. Cependant, ils voudraient bien pouvoir se débarrasser d’un aussi compromettant zélateur.

Barbey d’Aurevilly est un artiste, hélas ! l’un des plus hauts de ce siècle, et son indépendance est à sa mesure. C’est un chevalier qui ne traite ni ne capitule. Lorsque l’Univers reparut, il y a quelque vingt ans, après la levée de l’embargo impérial, Louis Veuillot acculé à sa promesse antérieure de prendre avec lui ce redoutable compagnon, allégua, pour s’y dérober, l’impossibilité de discipliner un pareil confrère, — tirant, comme une couverture, cette lâcheté de son esprit sur une lâcheté plus basse de son pouilleux cœur. Veuillot en réalité, redoutait fort le voisinage immédiat de Barbey d’Aurevilly dont le talent énorme eût offusqué ses prétentions au ca-