Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/276

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et damassée, soutient à peine le bambin, et tout entière la femme s’affaisse dans la chaise aux volutes d’or.

« La robe bleue étreint une poitrine où l’angoisse, s’il n’était divin, ce lait de vierge, le ferait tourner, comme aux nourrices qui ont eu grand’ frayeur.

« Les cheveux, — et cela a un air de lamentation symbolique, — un mouchoir sombre les recouvre et retombe en pleurant sur les oreilles, — coiffure peut-être de contadine, peut-être authentique de dame florentine, mais qui, là, accentue et remémore le deuil de l’âme.

« La merveille, c’est la tristesse absolue de la Mère et du Fils, — n’osant se regarder, se connaissant tous les deux voués à un supplice ineffable et sans rémission : mais la nature humaine, naturelle en la mère, imposée au fils par l’ordre suprême, se crispe un instant sous l’inéluctable réalité ; ils ont peur, peur l’un de l’autre, peur du spectacle visible en leurs yeux, ils ont éternellement peur, et ils savent, les inconsolables, qu’ils ne doivent pas être consolés »[1].

Est-elle assez admirable, cette page qui n’est certes pas la seule, mais que je tenais à citer, parce qu’elle précède immédiatement l’apparition décisive du Planctus.

  1. Latin mystique, chap. xix.