Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/352

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vres dans leurs cavernes pour en faire l’utile engrais du pédantisme impuissant. C’est une chance abominable qu’il faut accepter quand on entreprend d’escalader le tonnerre.

III

Barbey d’Aurevilly ne put jamais être démonté. Dès son arrivée dans le plus vermineux des siècles, il avait dû sentir l’impossibilité pour lui de s’acclimater et il commença de bonne heure à courir le guilledou de la Poésie. Il convoita du premier coup les cadastres et les inventaires de l’Infini et il fut presque l’unique exemple d’un poète que les échéances brutales de la vie n’aient jamais pu dégriser. C’était un vierge de l’enthousiasme et du trompe l’œil divin, inaccessible à tous les limons de l’expérience, improfanable à perpétuité. Mais voici le miracle. Ce vagabond obstiné des orients en flammes et des pâles banquises des cieux, ce célicole errant du dithyrambe et de l’extase était, par surcroît, un intuitif surprenant de la crasse humaine. Il connaissait le hideux péril de tomber sur de sales continents littéraires et se cramponna jusqu’à la fin avec une vigueur presque surhumaine.