Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/125

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Il était indispensable de tirer ce pauvre être de lui-même, de le tamiser, de le filtrer, de l’inaugurer enfin, de lui conditionner, en quelque manière, un petit fantôme plus vivant qui lui soutirât peu à peu son identité.

Les résultats furent tels, en apparence, que je suis excusable d’avoir pu me considérer moi-même comme un thaumaturge, au point d’oublier la loi formelle de régression à leur type rudimentaire, des bêtes ou des végétaux dont on interrompt la culture.

J’eus le malheur de ne pas entendre les rappels incessants du gratte-cul primordial et indéfectible.

Je crus, en un mot, que ce pauvre Némorin pouvait marcher seul et l’ayant étayé vingt ans, je commis l’imprudence irréparable de le déposer sur le sol.

Ce qu’il est devenu, je ne sais pas comment j’aurai la force de le dire, mais pouvais-je supposer que tant d’efforts seraient si complètement, si abominablement perdus, dès le premier jour, et n’auraient pas d’autre salaire que cette amertume infinie d’en constater à la fin l’inutilité ?



On le nommait le doux Thierry et ce n’était pas une antiphrase. Il était doux comme les plumules des