Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/287

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vieille malle poilue et cadenassée sur laquelle s’asseyaient parfois les visiteurs.

Tel était le mobilier, assez semblable à beaucoup d’autres, dans cette joyeuse capitale de la bamboche et du désarroi.

Mais ce qu’il y avait de particulier et d’atroce, c’était la prétention de dignité fière et de distinction que l’habitante du lieu, madame Demandon, avait répandue, comme une pommade, sur la moisissure de cet effroyable taudis.

La cheminée sans feu ni cendres eût pu être mélancolique, malgré sa hideur, sans le grotesque encombrement de souvenirs et de bibelots infâmes qui la surchargeaient.

On y remarquait de petits globes cylindriques protégeant de petits bouquets de fleurs desséchées ; un autre petit globe sphérique monté sur une rocaille en béton conchylifère, où le spectateur voyait flotter un paysage de la Suisse allemande ; un assortiment de ces coquillages univalves dans lesquels une oreille poétique peut aisément percevoir le murmure lointain des flots ; et deux de ces tendres bergers de Florian, mâle et femelle, en porcelaine coloriée, cuits pour la multitude, on ne sait dans quelles manufactures d’ignominie.

À côté de ces œuvres d’art se nichaient des images de dévotion, des colombes qui buvaient dans des calices d’or, des anges portant à brassées le « froment