Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/306

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de poésies, les feuilles étaient dans un tel état qu’on devait, en gémissant, renoncer à les parcourir après lui. Les dédicaces même y passaient.

La sentimentale Orthodoxie en perdait la tête, ne parvenant pas à retrouver le fil des histoires, se voyant tout à coup privée d’un chapitre décisif qui l’eut éclairée, sans doute ; forcée, malgré son inexpérience, de bâtir elle-même des épisodes improbables, de conjecturer d’impossibles dénouements.



La nécessité, dit-on, rend ingénieux. Cette histoire véridique va nous en fournir la preuve.

Il arriva qu’un certain jour un robuste commissionnaire apporta les œuvres complètes du célèbre romancier russe Borborygme, qu’on venait enfin de traduire.

Depuis longtemps, la jeune fille rêvait de lire les pages émollientes et philharmoniques de ce Moscovite relâché. Mais il était trop facile de prévoir que cette masse précieuse n’échapperait pas à la destinée commune des papiers lyriques ou documentaires dont le cabinet de lecture s’emplissait continuellement.

Pour conjurer cette catastrophe, il n’y avait pas une minute à perdre. Orthodoxie alla donc trouver sur-le-champ la tante Roxelane, qui se piquait aussi