Page:Bloy - Le Désespéré.djvu/236

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l’article travaillent, présentement, à lui manufacturer d’innombrables émules. Il y a bien aussi un autre courant qu’il faudrait appeler Didonien, où la médiocrité d’âme n’est pas moindre ni le génie plus absent. Car ils sont de divers paillons, les bateleurs, dans l’Ordre dominicain, tel que l’a confectionné ce trombone libérâtre de Lacordaire. Ils ont tous, plus ou moins, la nostalgie du boniment. Mais le Didon, qui ne se satisfait pas d’être une bouche du néant, et qui va prostituant sa robe de moine sur les tréteaux du cabotinisme international, nous sortirait du clergé honnête pour nous mener droit aux soutaniers apostats ou schismatiques, — ce qui serait évidemment moins décisif, comme sputation à la Face endurante du Christ !

Quant aux autres serviteurs de l’autel et à la masse entière des fidèles, c’est inexprimable et confondant.

On se serre, on se tient les coudes, on s’empile en fumier d’imbécillité et de lâcheté. On se précipite au Rien de la pensée, pour échapper à la contamination du libertinage ou de l’incrédulité.

En même temps, par un repli tout orthodoxe, on met soigneusement à profit l’impiété du siècle pour allonger quelque peu la corde des prescriptions ecclésiastiques. L’Église ayant réduit à presque rien la rigueur de ses pénitences, dans l’espoir toujours déçu d’un plus prompt retour des brebis folâtres qu’elle a perdues, les moutons demeurés fidèles utilisent, en gémissant au fond du bercail, les regrettables concessions de leurs pasteurs. Et toutes les pratiques suivent la même pente, l’époque n’étant pas du tout à l’héroïsme des œuvres surérogatoires.