Page:Bloy - Le Désespéré.djvu/353

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lice n’avait pu faire. Le lycanthrope était vraiment en fureur. Il devint pâle et ses yeux noircirent.

— Pardon, dit-il, en étendant la main, comme pour imposer silence au tas de viande poilue qu’on venait de consulter et qui se préparait à répondre, l’avis de monsieur Beauclerc est sans intérêt pour moi. Je tiens même à l’ignorer absolument, et je m’étonne, monsieur Beauvivier, que vous ayez eu l’idée de me faire asseoir à votre table pour mettre la dignité de ma personne en expertise. J’étais loin de supposer que la lecture que vous venez d’applaudir, et que je n’ai faite que pour vous complaire, dût être, sitôt, l’occasion du mortifiant éloge dont vous m’accablez, et de l’arbitrage plus outrageant qu’il vous plaît d’invoquer !

Beauvivier, surpris, se récria :

— Comment est-il possible, cher monsieur, que vous dénaturiez à ce point mes paroles et mes intentions ? En vérité, je ne devine pas en quoi j’ai pu vous offenser…

Plusieurs parlèrent à la fois. — Il est bien mal élevé, ce catholique ! disait Beauclerc. — Il a été mordu par Veuillot, ajoutait Tinville. D’autres exclamations du même genre coururent d’un bout de la table à l’autre. Le chenil, un instant maté, retrouvait sa gueule.

— Si vous avez besoin que je vous explique en quoi vos paroles m’ont révolté, reprit Marchenoir, il est douteux que mes explications vous éclairent et vous satisfassent. Néanmoins, les voici, en aussi peu de mots que possible. Je regarde l’état de comédien comme la honte des hontes. J’ai là-dessus les idées les plus centenaires et les plus absolues. La