Page:Bloy - Le Désespéré.djvu/389

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« Et d’abord, le plus glorieux de tous ces élus, — le Jupiter tonnant de l’imbécillité française, — Georges Ohnet, le squalide bossu millionnaire, dont la prose soumise opère une succion de cent mille écus par an sur l’obscène pulpe du bourgeois contempteur de l’art. Immédiatement après, son illustre fils, Albert Delpit, le virtuose du foyer correct et le peseur vanté de fécule psychologique, Lovelace châtré, au strabisme innocemment déprédateur.

« Puis, une sale tourbe : Bonnetain, le Paganini des solitudes, dont la main frénétique a su faire écumer l’archet ; — Armand Silvestre, l’éternel rapsode du pet, que ses latrinières idylles ont fait adorer des multitudes ; — le virginal Fouquier, moraliste hautain, héritier du bois de lit de feu Feydeau, ferré aux quatre pieds sur toutes les disciplines conjugales et juge rigide en matière de dignité littéraire ; — l’aquatique Mendès, aux squames d’azur, ami de Judas par charité et lapidateur de l’adultère par esprit de justice, espèce de bifront sémite à double sexe, l’un pour empoisonner, l’autre pour trahir ; — Dumas fils, le législateur du divorce et du relevage, qui inventa de remplacer la Croix par le speculum pour la rédemption des sociétés ; — Alphonse Daudet, le Tartarin sur les Alpes du succès, pour avoir pris la peine de naître copiste de Dickens, eunuque trop fécond qu’il trouve le moyen de tronçonner encore depuis quinze ans ; — les deux batraciens oraculaires, Wolff et Sarcey, de qui relèvent tous les jugements humains et dont la disparition calamiteuse, en la supposant conjecturable, produirait immédiatement l’universelle cécité ; — enfin, pour n’en pas nommer cinquante autres, Er-