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LE SERVITEUR DE DIEU

gigantesque passeur de l’Enfant divin. La circonstance du fleuve au lieu de la mer a peu d’importance au point de vue symbolique, puisque, dans les deux cas, il s’agit de porter Jésus au travers d’une eau quelconque, mais d’une eau ennemie et qui ne peut être vaincue que par la force colossale du bon géant.

Quoi qu’il en soit, il est permis de demander quel homme historique, quel héritier de gloire, quel naïssant couronné, quel porphyrogènète fut jamais de plus grande race que celui-là ? La transmission Physiologique d’un sang plus ou moins pourpre ou azur n’est pas absolument tout pour des penseurs spiritualistes et providentiels. Au-dessus de la race physique, ils admettent encore une mystérieuse lignée des âmes à la manière de la postérité d’Abraham, ou, plus profondément encore, à la manière de saint Jean-Baptiste renouvelant le prophète Élie, dans l’esprit et dans la vertu de leur commune prédestination.

Christophe Colomb a écrit lui-même : « Je ne suis pas le premier Amiral de ma famille. » Il aurait pu dire tout aussi bien qu’il n’en était pas non plus le premier prince, ni le premier prophète, ni le premier apôtre, ni le premier martyr et envelopper ainsi d’une seule étreinte d’amour filial l’imperceptible groupe des plus sublimes créatures humaines. Assurément, cet Amplificateur de la Création n’est d’aucune façon le fils du Hasard, comme voudraient le faire croire les misérables Enfants-Trouvés de la Libre Pensée qui ont imaginé de supprimer la Providence pour écarter les inconvénients divins de la Réversibilité. Celui qui devait être l’Ambassadeur de Dieu et le Héraut de Jésus-Christ est venu au monde en son temps et à son heure comme