Aller au contenu

Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/343

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
315
APPENDICES

tribu des Ciguayens pouvait fournir un contingent de quinze mille guerriers valeureux. Colomb avait déjà pu juger de leur bravoure. Un d’entre eux avait osé venir seul à son bord, se promener fièrement, goûter les provisions, tout examiner en détail et se retirer ensuite, sans manifester ni satisfaction ni crainte.

« Une autre fois, un canot portant quatre insulaires, deux femmes et un enfant, fut surpris par une chaloupe espagnole, que montaient plus de vingt-cinq soldats. Loin de s’intimider, jes naturels, hommes et femmes, saisissant aussitôt leurs arcs, commencèrent l’attaque. Ils blessèrent mortellement deux Espagnols. La chaloupe ayant fait chavirer le canot, ils continuèrent à tirer leurs flèches tout en nageant, et s’échappèrent enfin en plongeant très bas[1].

« Le courage, pas plus que la présomption, ne faisait défaut aux indigènes. D’ailleurs, la fierté est de tous les pays, comme de tous les temps. L’Archichronographe royal des Indes en cite, par occasion, un fort curieux exemple. Lorsque sur la côte d’Uraba, le bachelier conquérant Encise, pour se procurer des vivres, sortit de son campement à la tête de cent hommes, « il rencontra trois Indiens qui, par audace, attaquèrent les Castillans, comme s’il n’y en eût cu que deux contre mille Indiens : ils tirèrent leurs flèches si promptement et en blessèrent tant, qu’avant qu’on les pût atteindre, is avaient vidé leurs carquois, et se mirent à fuir de telle sorte qu’il semblait que le vent les emportat[2]. »

« On ne doit pas oublier que près de Veragua, le 6 avril 1503, les indigènes attaquèrent à la fois les Espagnols sur le fleuve et sur le rivage, pénétrèrent dans leur camp, malgré la valeur de l’Adelantado et de Diego Mendez ; massacrèrent

  1. Roselly de Lorgues, Histoire de Christophe Colomb, Ier vol, p. 433.
  2. Harnera, Histoire générale des voyages et conquêtes des Castillans dans les îles et terre ferme, liv. VIII, ch. vi.