Page:Bloy - Le Salut par les juifs, 1906.djvu/93

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ne devait lui être permis d’expirer que lorsque toutes les larmes des générations seraient sorties de ce véritable Calice de son Agonie qui était Mon Cœur !

L’Ange qui l’avait assisté la veille s’était enfui vers le ciel, son Père venait de l’abandonner, la sentence rigoureuse : « Malheur à celui qui est seul », se réalisait en lui d’une manière infinie et sans exemple.

Sa Mère elle-même lui était devenue comme une étrangère, depuis qu’il s’en était dépouillé pour son disciple, avant de demander à boire.

Il était désormais seul à seule et face à face avec Judith, comme un Holopherne cloué dans le lit de sa perdition[1].

Le soleil déjà s’obscurcissait pour échapper à l’horreur de cette confrontation silencieuse et les morts commençaient à se démener dans leurs sépultures…

— Buvez, mon Fils, — disaient les voix désolées de mon abîme, — buvez ces larmes de tristesse et ces larmes de colère. Le fiel n’avait pas assez d’amertume et le vinaigre n’avait pas

  1. Épître de la messe des Sept Douleurs.