Page:Bloy - Le Sang du pauvre, Stock, 1932.djvu/177

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sortirons de céans. Toujours nous tisserons des étoffes de soie et nous n’en serons jamais mieux vêtues. Toujours nous serons pauvres et toujours nous aurons faim et soif. Nous aurons beau gagner, cela ne nous fera pas mieux manger. C’est à grand’peine que nous avons du pain, un peu le matin et moins le soir. Sur ce que nous gagnons, chacune de nous ne conserve pour son entretien que quatre deniers par livre et cela n’est pas assez pour avoir suffisance d’habits et de nourriture… Cependant il n’est pas une seule d’entre nous dont le travail ne rapporte vingt sous et plus à la semaine. Un duc en serait riche et nous sommes en grande pauvreté, et celui pour qui nous travaillons est riche de notre mérite. Pour gagner nous veillons une grande part des nuits et les journées entières. Si nous voulons nous reposer un instant, on nous menace de nous tourmenter les membres. C’est pourquoi nous n’osons prendre aucun repos[1]. »

  1. Citation empruntée à un excellent article : Femmes esclaves, signé R. Périé, dans la revue « Pages libres », numéro du 3 août 1901