Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/130

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sa nation dont il paraissait être le chef et qui s’étaient engagés avec lui.

On savait peu de chose de ces aventuriers à mines féroces dont personne dans le bataillon ne pouvait entendre la langue. Ils étaient venus offrir leurs services, en justifiant de leur nationalité et, sur l’heure, on les avait incorporés et armés sans en demander plus long, l’époque n’étant pas aux certificats.

Leurs noms barbares inscrits régulièrement au rôle avaient beau être vociférés à chaque appel, aucun homme n’avait pu les retenir et tout le monde se bornait à les désigner sous le nom générique de polaques impliquant, d’ailleurs, en même temps qu’une bravoure légendaire, les instincts de soulographie et de pendardise qui font impression sur le soldat.

Leur chef seul jouissait d’une épithète. On l’appelait le grand Polaque, à cause de sa taille vraiment extraordinaire. Mais il eût été peu facile de trouver un malotru plus hétéroclite et plus malgracieux.

Son aspect évoquait l’idée de quelque araignée monstrueuse, toute en pattes velues et gigantesques. Ses mains descendaient si bas qu’il aurait pu, croyait-on, ramasser des pierres sans se courber, et il était si drôlement bâti et configuré que ses moindres gestes ressemblaient à des exercices de dislocation.

Sur le tréteau d’un saltimbanque, il eût sans