Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/136

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il y eut un moment d’énorme stupeur. C’était donc pour cela qu’on était venu ! Le lieutenant peu héroïque sans doute, alarmé de l’imminence d’un massacre inutile, subjugué peut-être aussi par le ton tranchant de ce victorieux, ne vit pas immédiatement la réponse qu’il y avait à faire.

Le grand Polaque répondit pour lui. Une gifle surhumaine paraissant emplir le ciel d’Orient en Occident s’abattit sur la face du chef prussien démantibulé du coup.

Ce fut le signal d’une fusillade enragée qui faucha, dans une seconde, le lieutenant, le sergent-major et un bon tiers de leur effectif. Les Polaques, miraculeusement préservés, s’élancèrent alors dans la masse allemande, entraînant les autres par leurs cris sauvages.

Et ce fut la grande fête, le joyeux jubilé du sang pour ces exilés devenus comme la tempête et qui s’estimaient peut-être autant que des Jagellons.

Quelque incroyable que cela puisse paraître, il ne fallut pas moins d’une heure pour les tuer, ces tueurs effrayants qui ne s’arrêtaient pas d’égorger et, lorsque tous les autres étant morts, le grand Polaque n’ayant plus de bras, plus de visage, plus de voix et percé de cinquante coups dut expirer à son tour, les Prussiens, inimaginablement décimés, eurent peur !