Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/252

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monde, l’amant attitré de la Boulotte, fille publique aussi notoire que la lune qui l’aimait avec fureur et qu’il n’essaya jamais de promouvoir à quelque industrie moins séculière ! La vérité connue, c’est qu’il en vivait, mais il ne se trouva point dans la ville un page assez audacieux pour le lui dire.

Lorsque les corps francs s’organisèrent, il s’engagea spontanément. L’expliquera qui pourra. Cet homme exécrait tous les Allemands et ne pouvait en entendre parler sans devenir pâle. Ayant eu la chance de tomber sur un bataillon qui se signala de façon particulière, l’occasion lui fut donnée, combien de fois ! de déployer, selon les circonstances, une audace tranquille, ou une audace déchaînée qui coûta cher aux soudrilles de von der Tann ou de Mecklembourg et dont ses camarades parlaient avec une sorte d’extase.

Mais maintenant que tout lui semblait « foutu » et qu’il s’agissait de décamper, zut ! il en avait assez du fourbi et du fourniment et il ferait désormais la guerre pour son propre compte, s’il lui plaisait de la faire.

Cependant, avant de réaliser l’espèce de folie qu’il avait conçue, il alla trouver le chef.

— Commandant, lui dit-il, est-ce que c’est vrai qu’on se tire des pieds aujourd’hui ?

— Il le faut bien, N. de D. ! et il n’est que temps. Il y a peut-être vingt mille cochons autour de nous