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Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/257

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pieuses, aux yeux sombres et éclatants, au front bas et dur casqué de cheveux d’un noir d’anthracite, évidemment façonnée pour la prostitution, et qui devait facilement affoler les hommes.

En quelques phrases rapides, Léonard lui communiqua son plan. Un vrai plan de désespéré dont l’insurpassable démence n’égalait pas la férocité.

Cela consistait à égorger sans esclandre, non seulement les visiteurs actuels, mais tous ceux qui viendraient les jours suivants. L’excitante Boulotte rabattrait le gibier et les corps seraient jetés dans un vieux puits aménagé dans cette vieille maison.

En s’y prenant bien, cela pourrait durer quelques jours. Après ça, si les Prussiens n’avaient pas évacué la ville on verrait à se faire tuer le plus gentiment du monde. Quant aux pensionnaires de la maison !…

Ces deux êtres étaient si faits l’un pour l’autre que la Boulotte n’eut pas même un tressaillement. Loin de là, ses traits s’amplifièrent, comme dans la sérénité d’une vision béatifique. La pensée de la mort, de l’inévitable mort, ne fut rien pour elle, et sans qu’un muscle bougeât, tant était calme le fleuve de sa volonté, elle donna toute sa vie dans un long et terrible baiser d’enthousiasme à cet homme sanguinaire, comme elle aurait donné tout son corps.

Seulement, on avait un peu trop compté sur la