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Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/26

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sueur de sang

diffamée dans le blason d’un Hospitalier convaincu de félonie ou de cruauté.

Son maître seul en prenait soin, ayant des yeux autour de la tête pour veiller sur elle quand il s’en éloignait un instant, et le comble de l’audace eût été de s’en approcher sans sa permission.

Une seule fois on le vit en fureur, et quelle fureur ! Un tringlot malchanceux, que l’animal gênait, s’était avisé de le prendre par la bride et de l’écarter assez rudement. Il n’alla pas loin. Notre aventurier, qui buvait à deux pas de là dans un café, ne prit même pas le temps d’ouvrir la porte. Au risque de se couper la figure en vingt morceaux, il s’élança sur le sacrilège par une large baie vitrée dont il creva la glace avec un fracas terrible, et l’accommoda sur-le-champ d’une si fougueuse volée que le pauvre diable dut être porté le soir même à l’ambulance.

L’impétuosité inouïe de cette rafale de colère, chez un homme impassible comme les idoles, donnait à soupçonner une étrange complicité. Il devait y avoir, entre ces deux individus presque fantastiques, de bien singulières histoires de massacres, d’enlèvements, de piraterie, d’épouvante ou de trahison. On ne savait pas, et les conjectures allaient leur train dans la direction présumée de cet Orient d’où ils paraissaient être venus, lequel est aussi effrayant encore, malgré tout, pour les gens d’imagination, qu’au treizième siècle où son nom seul terrifiait les pèlerins et les chevaliers.