Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/270

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fonde encore que la première, lui répondit. Évidemment, l’être humain capable de la proférer était à sa dernière heure.

Cette mère douloureuse, qui reconnut alors tout à fait son fils, se tordit les mains, éclatant de désespoir.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! est-ce possible, cela ? Permettrez-vous que mon enfant meure si près de moi, sans que je puisse du moins le baiser une dernière fois, en attendant que vous me preniez à mon tour ? Oh ! non, n’est-ce pas ? Ce serait trop exiger de vos créatures. Attends, mon chéri, ne meurs pas encore. Ta mère va venir…

Et la malheureuse, aussi morte par en bas que les momies qui ont trois mille ans, se mit à ramper sur son lit, traînant sa moitié de cadavre par l’effort surhumain de ses deux bras.

Quelques minutes plus tard, elle tombait lourdement sur le parquet. Mais il ne lui fut point accordé d’ajouter à son voyage la longueur du pas d’un grillon, et les larves inclémentes des nuits polaires furent les seuls témoins de cette double agonie.