Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/293

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marchaient sur Orléans et qu’ils étaient absolument seuls au milieu des bois.

Il avait donc fallu tourner le dos à Paris qui se délivrerait lui-même comme il pourrait, devenir pareils à des fluides pour se glisser entre les lignes ennemies et marcher trente heures dans un froid polaire capable de cristalliser jusqu’à la bave du grand-duc de Mecklembourg. Première étape de vingt-sept lieues.

La chasse avait duré huit jours et autant de nuits, pendant lesquels on avait dû s’habituer à la privation de sommeil et de nourriture. Arrivés enfin comme des épaves à Châteauroux, après maints circuits, détours et contre-détours pouvant équivaloir à une notable partie de la distance qui nous sépare de la lune, il avait paru nécessaire à quelques personnages éminentissimes et superfins d’empiler ce calamiteux bétail dans des trains cataleptiques dont la lenteur eût exaspéré le cocher des morts.

Châteauroux, Saint-Sulpice-Laurière, Poitiers, Niort, Angers et le Mans, tel avait été l’itinéraire d’un voyage de soixante-douze heures dans des fourgons, dans des wagons de guignon dont toutes les vitres étaient brisées, par une température de 18 à 23 degrés au-dessous du gel.

Immédiatement après cet essai de pétrification des défenseurs de la patrie, reprise des promenades militaires, à travers le département de la Sarthe. Escarmouches ridicules, reconnaissances multi-