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Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/52

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sueur de sang

qui ne valaient certes pas la peine d’être pillés, étaient tirés, à force de coups, par de minables chevaux qu’on n’avait pas eu le temps de manger. Il y avait, Dieu me pardonne ! jusqu’à des chiens, dans le défilé processionnel de notre agonie.

Et l’horrible cloaque neigeux assourdissait, comme un tapis de quatre-vingts lieues, ce cheminement lugubre.

Brusquement tout s’arrêta. De l’avant de cette masse humaine arrivait un choc soudain qui nous jeta les uns sur les autres et nous contraignit à refouler à notre tour, au prix de nos énergies dernières, le misérable troupeau qui nous talonnait.

Cette commotion, qui dut se transmettre au loin, détermina un commencement de sauve-qui-peut. Plusieurs s’élancèrent de l’un et l’autre côté de la route, essayant de fuir à travers champs. Mais la neige ennemie, l’implacable vierge, plus à craindre que tous les Allemands pour des hommes à bout de souffrances, les découragea bientôt.

Il y eut donc un de ces arrêts sinistres si fréquents où chacun faisait l’éternelle question : « Sommes-nous tournés ? » qui fut la grande anxiété militaire en ce temps-là et démoralisa si souvent les plus intrépides.

Station mortelle d’une demi-heure environ. Quel-