Page:Blum - L’Exercice du pouvoir, 1937.djvu/283

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Je dois aussi vous signaler qu’avant de conclure à l’envoi en Conseil de guerre, le rapport du commandant Arnould commence ainsi… »

— Je vous l’ai lu déjà tout à l’heure. —

« … Le soldat Salengro était cycliste du chef de bataillon. Durant les journées des 5, 6 et 7 octobre, l’attitude de ce soldat, sous un bombardement infernal, fut celle d’un soldat à la fois brave et dévoué pour ses chefs et ses camarades.

« C’est en plein jour, vers seize heures… » — probablement un peu plus tard quand on rapproche toutes les pièces du dossier, car c’est à seize heures qu’il s’est présenté au poste de secours du médecin Willot, d’où il est allé ensuite à la 24e compagnie — « … c’est en plein jour que Roger Salengro a disparu en avant des lignes.

« Un témoin, le lieutenant Deron, a déposé : Salengro s’approchait de la crête. Je pris mes jumelles pour l’observer. À ce moment, un soldat cria : il mérite la croix de guerre. Il l’aura, répondis-je.

« Le seul Conseil de guerre qui ait jugé Salengro l’a acquitté, fait d’autant plus remarquable que l’accusé était contumax, c’est-à-dire absent et sans défenseur, et que, dans la plupart des cas de contumace, un jugement de condamnation était rendu à l’effet de provoquer plus tard un jugement contradictoire.

« Le scandale n’est donc pas du côté où vous vous obstinez à le chercher, il est dans cette campagne abjecte, inspirée par des passions politiques qui ne respectent ni la vérité des faits, ni l’autorité souveraine de la chose jugée, fondement de l’ordre public. »

Je pense qu’après une pareille lettre, je peux le dire, tout aurait pu et tout aurait dû s’arrêter.

M. le ministre de la Défense nationale avait lui-même compulsé et vérifié les pièces ; il affirmait,