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classe ouvrière de dissocier, d’une façon complète, son action directe de classe de son action politique et d’arrêter ou de freiner complètement l’une par la raison que l’on constate un progrès de l’autre.

Bien loin de là, c’est un fait d’expérience et qu’en même temps la réflexion confirme : à un progrès de l’action politique correspond toujours à peu près nécessairement une recrudescence de l’action directe de la classe ouvrière. Il est parfaitement naturel, parfaitement explicable, surtout au sortir d’une longue période de misères et de souffrances, que la victoire remportée sur le terrain politique crée dans la classe ouvrière une impatience de voir réaliser les réformes mêmes que sa victoire lui permet d’espérer.

Ce sont là de très simples vérités, et elles sont d’une application encore moins facilement évitable, lorsque les événements se placent, comme aujourd’hui, au sortir d’une crise prolongée qui a, tout à la fois, agi sur le taux des salaires, sur les conditions du travail et sur le droit syndical, c’est-à-dire sur les relations entre les ouvriers d’une entreprise et le patronat.

Il faut dire clairement cela. Mais en revanche, il y a quelque chose que nous devons aussi nous dire à nous-mêmes, en présence de mouvements comme ceux-là, c’est qu’ils doivent, en tout état de cause, rester sous la direction et sous le contrôle de l’organisation syndicale autonome ; qu’en tout état de cause, nous devons nous garder, pour notre part, d’agir en sorte qu’ils puissent échapper, dépasser le contrôle et la direction de l’organisation syndicale. Et, de même que nous devons nous efforcer de donner à l’opinion publique l’intelligence des mouvements ouvriers, c’est aussi notre rôle de nous tourner vers les masses ouvrières, et de leur montrer à quel point leur confiance explicite, formelle et constante, nous est nécessaire.