Aller au contenu

Page:Božena Němcová Grand-mère 1880.djvu/68

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 58 —

des temps bien durs ; mais je ne m’en suis jamais séparée. C’est dommage, oh ! grand dommage que ce bon seigneur repose déjà sous la froide terre ! » dit grand’mère, en finissant son récit par un profond soupir.

« Oui, c’est grand dommage, » ajoutèrent les autres. Les enfants, qui venaient d’apprendre l’histoire de l’écu, le retournaient dans tous les sens ; et, à dater de ce moment, il leur devint encore plus cher. Et grand’mère prit, à leurs yeux à tous, une plus grande valeur, du moment qu’ils surent qu’elle avait parlé à l’empereur Joseph.

Avec la soirée du dimanche commençait au moulin une nouvelle semaine. Ceux qui voulaient faire moudre arrivaient de tous les côtés ; les roues recommençaient leur fracas ordinaire ; le maître-garçon visitait plusieurs fois toute la meûnerie, pour voir, de son œil exercé, là où il manquait quelque chose, tandis que le plus jeune courait en chantant, et de haut en bas, et de bas en haut, d’une trémie à l’autre. Quant à monsieur le meûnier, il se tenait debout, accueillant, avec un visage rayonnant, les pratiques qui lui apportaient du profit, et en leur offrant à chacune une prise de tabac.

En été, la meûnière et sa jeune fille, Marie, accompagnaient grand’mère jusqu’à l’auberge. Si l’on entendait de la musique, elles s’arrêtaient à la haie, avec plusieurs autres villageoises, pour regarder la jeunesse dansante. Il était impossible de pénétrer dans la salle de danse, tant il y avait de monde. Et même Christine, qui portait toujours de la bière au dehors, c’est-à-dire dans le verger où s’étaient