Page:Bodin - Les Six Livres de la République, 1576.djvu/700

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gens ramassez, esclaves, & artisans, armez de bastons, & de pierres venir en pleine assemblee du peuple, & chasser la plus saine partie, & tuer celuy qui avoit emporté le Consulat à la voix du peuple. Qui n’estoit pas chose nouvelle : car les competiteurs venoyent ordinairement armez soubs la toge, & bien accompaignez : Nous avons veu, disoit Ciceron, fort souvent en pleine assemblee des estats, les coups de pierre ruez de tous costez, & les espees aussi tirees, non pas si souvent, mais neantmoins trop souvent. Brief qu’on face recherche de toutes les Republiques populaires qui furent onques, on trouvera qu’elles ont presque tousjours eu guerre, ou à l’ennemi, ou à leur estat, ou bien qu’elles ont esté gouvernees en apparence par le peuple, & en effect par quelques uns des citoyens, ou du plus sage d’entre eux, qui tenoit lieu de Prince, & de monarque. Tandis que la Republique d’Athenes fut belle, ôc fleuriffante,
elle futgouuerneeparleSenat des Areopagites:&lors que leurpuiflan-
ce fut retranchee,Periclcs,dit Thucidide, eftoit vray Monarque d’icel-
Pericle ÔC ^e>ores qu’en apparence elle fuft populaire.Et Pierre Soderin, en la ha-
Laurens de ranguequ ^fifl; au peuple de Florence pour changer l’eftat,dift que du
Medicis temPs de Laurens de Medicis, la Republique en apparence eftoit po-
mona es pulaire, ôc eneffed: vne pure tyrannie: parce que Laurens gouuernoit
d’Athenes tout feu^mais ^ ne dit pas quelle ne fut onques plus fleuriflante, ôc que
Ôc de Floré- au Parauant » auoyent iamais eu dix ans de relafche,des feditions,&
cctfadions les plus fanglantes quifurent onques en Republique 8du mon-8 Macciaud.cn de. Auflî pouuons nous dire, que l’eftat populaire des Romains a efté
rhiftoire de Flore- niajntenu par JeSenat, & lauthorité d’iceluy fouftenuepar vnMane-
nius Agrippa, vn Camil, vn Papirius Curfor, vn Fabius Maximus, vn
Scipion,vn Caton,vn Scaurus,quiretenoyentlafplendeur du Sénat,ôc
feruoiëtau peuple de frein, pourlerefTerreraucunemét entre les barrie-
rûb"vmbra Scîpio- res d’onneur5 .Ainfi lifons nous quePelopidas,ôc Epamynodas eftoient
msvrbem terra- comme feigneurs de l eftat populaire des Thebains9 : apres la mortrum dominam la- ,t. O y r • r ■ » -1 •ti rt• n -1tere:nmus cms ^ defquels, le peuple lentit loudain qu il auoit perdu les mailtre-pilotes:
pro^puiuX’m comme il aduint en cas parcilaux Atheniens,apres la mortde Pericles,5jHutar.inPclo- ’ alors,dit Plutarque,, le peuple flotoit comme vn nauirefans gouuer-
pîdtnail:&commc chacun vouluftgouuerner,Ies vns faire voile, les autreslLTmPm- furgir au port, l’orage furuint, dit Polybe, qui fift périr le’nauire. Et
L’eftat po- combien que les Atheniens apres auoir perdu la fouueraineté de la
pulaire co- Grcce gouuernerent leur ville, & territoire populairement, fi eft-ce
feruépar vn queDemofthene difoit haut,& clair deuant le peuple, que l’cftat d’A-
petit nom- thenes, eftoit (oubs la puiflance des orateurs,& harangueurs defquels
bredefages dependoyent les capitaines, quiauoyent pourle plus trois cens hom¬
mes apoftez, pour faire paffer tout ce qu’ils vouloyent a prix d argent,
maladie commune, dit Plutarque,à toute Republique populaire: & de
celle de Tarente difoit vnAmbaflàdeur, Inpoteflate iuniorumplebem, in
manuplchis rem Tarentinam ejje. E t fus le déclin de leftat pop ulaire en Ro-