Page:Bodin - Les Six Livres de la République, 1576.djvu/720

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de l’estoc paternel, mais qui doibt partage à ses coheritiers de 
toute la Monarchie, ou de partie d’icelle. ce quil eft befoin d’efclarcir
Le voile des par raifons neceffaires,& par exéples, pour leuerl opinion que plufieurs
rebellions impriment aux fugets dautruy ,&parce moyen entretiennent lesre-
contreles bellions,pour changerles Monarchies bien ordonnées,&remuer cielPrinces. & terre. Et tout cela fc fait foubs le voile de vertu , de pieté , ôc
de Iuftice.Et mefmes il s’en trouue qui ofent publier liures, &fou-
ftenir contre leur prince naturel venu à la couronne par légitimé fuc-
ceffion, que le droit de chois eft meilleur en la Monarchie : comme
il a efté [tait en Angleterre le v i i. Septembre m. d. l x v i . où la
Royne affifta à la difpute des efcholiers, à Oxefort, ce qui eftonna
les feigneurs qui eftoyent prefens, oyans cefte nouuelle dodrine de-
fcholiers. Or le pis eft que des paroles on vient aux prefehes publi¬
ques , ôc puis aux armes. Et qui eft celuy qui ne feroit pire , d’oyr
vn qui detefteles cruautez, les exadions dvn tyran, qui n’a ny l’hon¬
neur de Dieu , ny la vérité , ny la Iuftice en recommandation ? qui
chaffe les gens de bien, & fe ioint aux mefehans ? ôc qui adioufte à
la fin cefte exclamation , O que la Monarchie eft heureufe , où les
eftats du peuple font chois d’vn Roy iufte, &droi&urier: qui craint
Dieu fur tout:qui honnorela vertu, qui fut prix des bons, qui cha-
llie les vices: qui decerne le droit loyer aux gens de bien, ôc la peine
aux mefehans: qui a les flateurs en horreur : qui tient fa foy , & fes
promeffes : qui bannift les fàngfuesdecour, & les inuenteurs de nou¬
uelles exa£tions,qui efpargne le fang de fes fugets comme le fien : qui
vange les iniures d’autruy, ôc pardonne les fîennes : ôc qui fur tout à
la religion d’honneur deuant fes yeux. Ayant mis fesloüangesauco-
trepoix d’vne tyrannie comblee de tous vices , foudain le peuple fe
met en l’efprit, qu’il n’y a rien plus heureux que la Monarchie , qui
tombe en ele&ion. Et non feulement les fimples , ôc peu entendus
en la fcience politique, ains encores ceux-là qui font eftimez lesplus
fufifans s’abufent bien fouuent, ne prenant que le bien apparent a vn
cofté, Ôc laiflantles abfùrditez, ôc incommoditez qui fè trouuent d’au¬
tre cofté. Car mefmes Ariftote eft d’aduis^qu’on eflife les Monarques,
appellant Barbares ces peuples là , qui prennent les Roys par droit
fucceflif. ôc pour cefte caufe, il eftime les Carthaginois plus heureux
que les Lacedemoniens, parce que ceux cy prenoyent leurs Roys
Opinion par fucceflion de pere en fils, ôc ceux là les eflifoyent. Il faut donc
d’Ariftote appeller Barbares les Affyriens, Medois, Perfans, Egyptiens, Afia-
contraire a tiques, Parthes, Indois, AfFricains, Turcs, Tartares, Arabes,Mof-
touslespeu chouites , Celtes, Anglois EfcofTois, François, Efpaignols, Peru-
pies*tfînSjNumideSjEthiopiens, ôc infinis autres peuples qui n’ont Roysque par droit fucceflif Et mefmes nous trouuons en Grece, quieftle