Page:Boethius - Consolation 1865.djvu/167

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LA CONSOLATION PUILOSOPHIQUE, LIV. II, 83 félicité ? S’ils sont dépravés, je ne vois la qu’un fléau pour ta maison et une bande d’ennemis armés contre leur maître ; s’ils sont honnêtes gens, de quel droit comprends-tu la probité d’autrui dans le bilan de tes richesses ? Dlaprès cela, il est évident, que, de tous les biens que tu t’attribues, il n’en est pas un qui, au bout du compte, t’appartienne. Et s’ils n’ont en réalité rien de beau ni de désirable, pourquoi t’affliger de les perdre ou te réjouir de les conserver ? Que s’ils sont beaux naturellement, en quoi cela te regarde-t-il ? Par eux-mêmes, et distraits de ta fortune, ils plairaient tout autant. Car s’ils ont du prix, ce n’est pas parce qu’ils sont venus accroître tes richesses ; c’est plutôt parce que tu leur en supposais, que tu as voulu en grossir tes trésors. Au demeurant, quel est le but de tout ce bruyant étalage ? Apparemment de chasser la pauvreté par l’abondance. Or, elest tout le contraire qui arrive. Ce n’est qu’à grand renfort d’étais qu’on peut soutenir une si lourde masse dlobjets précieux. La vérité, clest que les besoins s’accroissent en proportion des richesses, et qu’au contraire ils se réduisent à peu de chose pour llhomme qui les règle sur les exigences de la nature, et non sur Yinsatiabilité de ses désirs. Vous ne trouvez donc en vous aucun bien qui vous soit propre, que vous demandez ainsi vos richesses aux objets extérieurs et étrangers à votre nature ? Par quel renversement des choses, un être vivant, presque un’dieu, puisqu’il est doué de raison, s’imagine-t-il qu’il n’a d’autre éclat que celui qu’il doit à la possession de quelques hochets inanimés ?

Le reste des créatures est satisfait de ce qu’il possède : mais vous, que votre raison assimile à Dieu, ce sont les objets les plus bas que vous choisissez pour orner votre nature si relevée ! Et vous ne sentez pas quelle injure vous faites à votre créateur ! Il a voulu que sur