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Page:Boirac – Le Congrès espérantiste de Genève, 1906.pdf/8

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toutes ces langues. L’Esperanto s’apprend directement, mais en l’apprenant on se trouve apprendre du même coup, et pour ainsi dire à son insu, des portions plus ou moins considérables de ces langues.

La seconde cause de l’extrême facilité de l’Esperanto est la simplicité de sa grammaire, qui peut tenir tout entière en quelques lignes. Par un système très ingénieux de terminaisons et d’affixes, toute confusion, toute erreur grammaticales sont rendues impossibles, en même temps qu’une multitude infinie de dérivations et de compositions permettent d’exprimer les plus diverses et les plus fines nuances de la pensée.

Ainsi tout mot terminé par la voyelle O est un substantif ; l’A est la marque invariable de l’adjectif ; l’E de l’adverbe ; l’I du verbe à l’infinitif. D’où cette conséquence que qui sait un mot en Esperanto en sait quatre par cela même. Par exemple, la racine lum (prononcée loum) donne, pour ainsi dire, mathématiquement lumo, lumière ; luma, lumineux ; lume, lumineusement ; lumi, luire. Pareillement la conjugaison, qui est identique pour tous les verbes, se réduit à six terminaisons : as pour l’indicatif présent ; is pour le passé ; os pour le futur ; us pour le conditionnel ; u pour l’impératif ; et i, que nous connaissons déjà, pour l’infinitif. Mi skribas, j’écris ; li skribis, il écrivait, ou il a écrit ; ni skribos, nous écrirons ; vi skribus, vous écririez ; skribu, écrivez ; skribi, écrire. De même enfin il suffit d’une trentaine d’affixes pour faire sortir d’une racine donnée toute la série des mots secondaires par lesquels s’expriment les différentes modifications de l’idée générale exprimée par la racine. Ainsi avec le suffixe ar qui signifie collection d’objets de même espèce, on forme arbaro, forêt ; bovaro, troupeau de bœufs ; vagonaro, train de chemin de fer ; abelaro, essaim d’abeilles, etc. ; avec le suffixe il, qui signifie instrument, on forme kudrilo (pr. koudrilo), aiguille de (kudri coudre), flugilo (pr. floughilo), aile (de flugi, voler) ; kombilo, peigne (de kombi, coiffer, etc.).

Cette structure de l’Esperanto en fait une langue d’une richesse extraordinaire, plus riche à certains égards non seulement que le français, mais même que l’anglais, l’allemand ou le grec ancien, se prêtant avec une aisance parfaite à l’expression de toutes les idées, même les plus délicates et les plus subtiles.