Page:Bois - L'Île d'Orléans, 1895.djvu/105

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bas du fleuve, l’alarme fut grande, car jusque là on n’avait pas ajouté foi aux projets des Anglais. De bon printemps, au commencement de mai, des ordres avaient été envoyés dans toutes les paroisses au-dessous de Québec, pour contraindre les cultivateurs et les chefs de famille de faire dans les bois des lieux de refuge, et de les approvisionner, puis de s’y rendre avec leurs enfants et tous les effets de ménage, ustensiles de culture, bestiaux, et autres vivres dès qu’on aurait la nouvelle de l’approche de l’ennemi. On fit donc partir des courriers pour mettre ces ordres à exécution, avec injonction de faire évacuer entièrement l’île d’Orléans, l’île aux Coudres, etc.

« Ces ordres si précipités, et, sans doute, irréfléchis, furent gauchement interprétés et bien mal exécutés. La crainte, la peur et l’animosité, sont de fort mauvaises conseillères. La maladresse et la précipitation firent à des milliers de propriétaires plus de tort que l’ennemi n’en aurait pu faire. Nombre de familles ont été ruinées par cet empressement inutile ; les trois-quarts des bestiaux périrent, et de longtemps les cultivateurs de l’isle aux Coudres et de l’isle d’Orléans, qui renfermaient au moins cinq mille têtes de gros bétail, ne se relevèrent de cette perte, sans parler des personnes, femmes et enfans, qui malheureusement périrent dans la bagarre, ayant été rassemblés à une extrémité de ces îles, sans qu’on eût auparavant procuré des bateaux en nombre suffisant pour les transporter, ni songé à y amasser des vivres pour les nourrir. On avait encore moins pensé à y élever des abris pour leur retraite…

« Vers le dix juin, on rapporta, à Québec, que les habi-