par les ouï-dire, les hasards des rencontres avec les bohémiens. Elle grandit, sèche et plate, se coulant partout, en couleuvre. Les premières réunions ont lieu dans l’île ou au milieu de l’étang… Elle glisse au fond du vieil esquif dont l’amarre d’elle-même se détache ; et elle va vers la terre enchantée où sonnent les éclats de joie, sans rame, portée par le courant, par les fées, les nymphes, par le cantique qui s’essore de sa poitrine, oppressée longtemps. Chez elle, la statuette de la Vierge s’enguirlande de roses mortes, elle s’assied sous la lithographie d’un cœur vulgaire transpercé de flammes ou de glaives, — envoûtement divin de Jésus où s’enfoncent tous les péchés humains ! Ses bandeaux calmes, déjà grisonnants, ses yeux baissés et blessés vers la pelote, ses doigts laborieux déliant le fil — ô Circé, elle revit ta magique quenouille, — ne laissent pas deviner au passant, lorsqu’il s’écarte, au hurlement rauque, hagard, d’un invisible dogue derrière la haie drue, que c’est elle l’infernale aboyeuse, la chienne intarissable mordant les reflets des fantômes, projetant l’agonie vers les berceaux[1].
Son roman — son histoire, devrais-je dire — il est de toute époque, perpétuel depuis la pythonisse vénérable et persécutée, la fuyante éryge[2] du sanglant moyen âge jusqu’à la somnambule d’aujourd’hui, à l’œil mauvais, mais aux cartes compatissantes qui apportent avec leurs figures diaprées, raidies, comme cadavéreuses, momies peinturlurées, la promesse d’une surprise — on ne sait quelle, — sans cesse convoitée. Voyante à table convulsive et élo-