Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/94

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permet de me faire une charge, dit-il entre ses dents. Si jamais je le retrouve, je le corrigerai de façon à lui ôter l’idée de recommencer. Quel vilain monde ! je ne m’y habituerai jamais, et décidément je m’en vais.

Il allait décamper quand il aperçut Gustave qui arrivait tout essoufflé.

— Enfin, te voilà ! dit Bécherel. J’allais partir. À quoi penses-tu de me laisser me morfondre sous cette colonnade ? Et me feras-tu le plaisir de me dire pourquoi tu m’as amené ici ?

— Pour te faire gagner de l’argent, grand nigaud, répondit Gustave en poussant son ami hors de la foule. Le tour est joué.

— Quel tour ?

— C’est bien simple. En arrivant à la Bourse, nous avons vendu trois cent mille francs de rente au cours de quatre-vingt-deux francs soixante-quinze, et nous venons de les racheter au cours de quatre-vingt-deux vingt-cinq.

— Je ne comprends rien à ce que tu me dis.

— Comment ! tu ne comprends pas que la différence entre le cours de vente et le cours de rachat est de cinquante centimes, à notre profit… ce qui représente un bénéfice à nous partager de cent cinquante mille francs… moins les courtages.

— Tu te moques de moi. D’abord, je ne t’ai pas autorisé à jouer pour mon compte. Et de plus, si j’avais perdu une somme aussi forte, je n’aurais pas pu la payer. Il m’est donc impossible de partager le bénéfice de ton opération. Ce ne serait pas honnête. Je refuse.

— Tu refuses ! s’écria Gustave. Ah tu en as, toi,