Page:Boisselot - Lischen et Fritzchen.pdf/5

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––––––Voulez-vous, mères de famille,
––––––Eviter le fouet trop brutal,
––––––Tout en frappant garçon et fille ?
––––––Mes balais ne font pas grand mal.
––––––Enfin, sur vos paisibles couches,
––––––Voulez-vous un sommeil charmant ?
––––––Vous n’avez, pour chasser les mouches,
––––––Qu’à faire ainsi tout en dormant.

(Elle s’évente avec un balai.)

–––––––––––P’tits balais,
–––––––Je vends, etc.
––––––Mais, je ne vois venir personne
––––––Qui se dispose à m’acheter.
––––––Ah ! mon commerce s’enguignonne,
––––––Je ferai mieux de le quitter.
––––––J’ai fait Paris et les provinces,
––––––Les provinces ne m’ont donné
––––––Qu’un bénéfice des plus minces,
––––––Sans qu’à Paris j’aie étrenné.
––––––Je ne m’explique pas les causes
––––––Qui de là m’ont pu renvoyer,
––––––Il m’a semblé voir tant de choses,
––––––Qu’on eût bien fait de balayer.
–––––––––––P’tits balais,
–––––––Je vends, etc.

C’est égal, ça n’est pas encore ici que je me rattraperai. Décidément les acheteurs ne sont pas gentils ; c’est qu’ils ne se contentent pas toujours de passer sans vous regarder ; ils viennent à vous comme s’ils allaient faire du commerce, et ils se gaussent tout bonnement de votre mise et de votre accent, quoi ! D’ailleurs mon accent ! est-ce que c’est ma faute ? je parle comme on parle chez nous. Pour ma mise, eh bien, qu’est-ce qui veulent donc ? Il n’est pas joli ce petit déshabillé-là ? Ça fait pitié… Bah !… j’ai presque de quoi retourner jusqu’au pays, moitié en patache et moitié à pied… avec quelques gros sous de plus. Voyons, je vais faire comme les hannetons, compter mes écus… dans ma poche, quatre gros sous… et neuf petits : dix-sept, et, dans mon portefeuille… voyons… (La lettre tombe.) Ma lettre, ma pauvre lettre ! Oh ! j’enrage-t’y de ne pas savoir lire… Mais depuis qu’un malin m’a joué un vilain tour en me lisant un jour tout le contraire de ce qu’on m’avait écrit, j’ose pus me confier à personne. C’est que c’est de mon bon papa, ça, et je veux pas que l’on me trompe sur ce qu’il me dit, le cher homme ; le premier garde champêtre que je rencontre… (Elle s’assied.) Voyons mes pièces blanches.