Page:Boissier - Cicéron et ses amis.djvu/293

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entièrement inconnus, comme Trebianus et Toranius, ce qui prouve que la vengeance de César ne s’arrêtait pas aux chefs du parti. On y rencontre aussi trois écrivains, et, ce qui est digne de remarque, c’est que ce sont peut-être les plus mal traités. L’un d’eux, T. Ampius, était un fougueux républicain qui ne montra pas dans l’exil autant de fermeté qu’on aurait cru. Il s’occupait à écrire une histoire des hommes illustres, et il parait qu’il ne profitait pas assez pour son compte des beaux exemples qu’il y trouvait. Nous connaissons mieux les deux autres, qui ne se ressemblent guère : c’était l’Étrusque Cæcina, un négociant bel esprit, et le savant Nigidius Figulus. Nigidius, qu’on mettait à côté de Varron pour l’étendue de ses connaissances, et qui était, comme lui, à la fois philosophe, grammairien, astronome, physicien, rhéteur et jurisconsulte, avait surtout frappé ses contemporains par la profondeur de ses recherches théologiques. Comme on le voyait s’occuper beaucoup des doctrines des Chaldéens et des Orphiques, il passait pour un grand magicien. On croyait qu’il prédisait l’avenir et on le soupçonnait de ressusciter les morts. Tant d’occupations d’un genre si différent ne l’empêchaient pas de s’intéresser aux affaires de son pays. On ne pensait pas alors qu’un savant fût dispensé d’être un citoyen. Il brigua et obtint des dignités publiques ; il fut préteur en des temps difficiles et se fit remarquer par son énergie. Quand César entra en Italie, Nigidius, fidèle à la maxime de son maître Pythagore, qui ordonne au sage de porter secours à la loi menacée, s’empressa de quitter ses livres, et il était au premier rang des combattants de Pharsale. Cæcina avait paru d’abord aussi ferme que Nigidius, et il s’était fait remarquer comme lui par son ardeur républicaine. Non content de prendre les armes contre César, il l’avait encore insulté dans un pamphlet, au commencement de la guerre : mais