Page:Boissier - Cicéron et ses amis.djvu/347

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pompée, nous savons qu’il se fit remarquer par son zèle[1] ; pourtant il s’y passait bien des choses qui devaient le blesser, et sans doute il trouvait que trop de rancunes, trop d’ambitions personnelles s’y mêlaient à la cause de la liberté, qu’il voulait seule défendre. C’est ce qui déplaisait aussi à son ami Cicéron et à Cassius, son beau-frère, et ces deux derniers, indignés du langage de tous ces furieux qui entouraient Pompée, résolurent de ne pas poursuivre la guerre à outrance, ainsi que les autres le voulaient. « Je me souviens encore, écrivait plus tard Cicéron à Cassius, de ces entretiens familiers dans lesquels, après de longues délibérations, nous prîmes le parti d’attacher au succès d’une seule bataille, sinon la justice de la cause, au moins notre décision[2]. » On ne sait si Brutus assistait à ces entretiens de ses deux amis ; ce qui est certain, c’est qu’ils se conduisirent tous les trois de la même façon. Cicéron, le lendemain de Pharsale, refusa le commandement des restes de l’armée républicaine ; Cassius s’empressa de livrer à César la flotte qu’il commandait ; quant à Brutus, il fit son devoir en homme de cœur pendant le combat ; mais, la bataille finie, il jugea qu’il avait assez fait et vint s’offrir au vainqueur, qui l’accueillit avec joie, le prit à part, le fit parler, et parvint à en tirer quelques lumières sur la retraite de Pompée. Après cet entretien, Brutus était tout gagné ; non seulement il n’alla pas rejoindre les républicains qui combattaient en Afrique, mais il suivit César dans la conquête de l’Égypte et de l’Asie.

  1. Ad Att., XI, 4.
  2. Ad fam., XV, 15.