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l’académie française sous l’ancien régime.

plus de considération que de notoriété. Elle se glorifiait sans doute de savants très distingués, comme Fréret, dont le nom avait surnagé, mais de ceux-là mêmes on ne connaissait guère les ouvrages. C’était pour elle, par rapport aux deux autres, à la fois une infériorité et un avantage. Étant moins célèbre, elle pouvait espérer qu’on la laisserait plus tranquille ; il semblait que l’ombre dans laquelle elle se tenait aurait au moins ce résultat de lui susciter moins de jaloux, de faire oublier ses origines royales elles préventions soulevées par ce nom d’académie qu’elle portait. En effet on ne voit pas qu’elle ait été attaquée dans les premiers temps du XVIIIe siècle ; mais à mesure que la Révolution approche, elle devient à son tour suspecte. Sa constitution même la fait soupçonner d’aristocratie ; elle contient, en tête de ses listes, dix noms de membres honoraires, qui sont de grands personnages, en général étrangers à l’érudition, et qui n’ont d’autre raison d’y être que la protection qu’ils peuvent lui accorder[1]. On

  1. Il avait été question d’établir aussi des membres honoraires à l’Académie française. Certains évêques et grands seigneurs le souhaitaient pour y siéger sans être confondus avec le gens de lettres. Louis XIV refusa. Il voulait qu’il y régnât la plus parfaite égalité.