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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

troupes, on va essayer de tenir ! Je le disais bien que ça ne pouvait pas se passer comme ça ! »

Enquête faite, ces hommes font partie d’une brigade de cavalerie envoyée pour couper les routes, faire sauter les ponts, enfin préparer à la marche de l’ennemi toutes les difficultés possibles. C’est le général de C… qui la commande. Dès que mon père a vu son nom, il lui a envoyé François avec une lettre le priant d’établir son quartier général aux Platanes. Mais M. de C… n’a pas osé s’éloigner de la ville où les dépêches de la division, qui se succèdent rapidement, le viennent chercher ; les ordres sont, à chaque instant, suivis de contre-ordres, et le plus léger retard pourrait avoir de graves conséquences. Cependant il a trouvé moyen de venir passer une demi-heure avec nous. Qu’il est changé ! Il paraît brisé par la douleur et ne parle qu’avec effort de ce qu’il a vu et de ce qu’il sait. Son fils unique doit être auprès du maréchal Bazaine, sous Metz ; il y a un mois qu’il n’en a eu de nouvelles. Les terribles batailles de Gravelotte et de Mars-la-Tour ont eu lieu depuis et le pauvre père est convaincu que son fils est tué. Il ne parle de lui qu’au passé. « Il était lieutenant au 4e chasseurs, » nous disait-il.

Puis on a passé la revue des amis communs engagés en ce moment. Le colonel A… a été tué à Forbach, et son beau-frère blessé à Reichshoffen. On manque complètement de nouvelles du capitaine Herbauld