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Page:Boissonnas, Une famille pendant la guerre, 1873.djvu/62

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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

hommes et femmes, revinrent à leur ouvrage. Ils passèrent auprès du capitaine, et, avec une présence d’esprit bien rare, aucun ne parut le remarquer ; il continua à travailler sans entendre une question. Seulement, quand l’heure du repas fut venue, l’un des ouvriers lui jeta une hotte et lui fit signe de les suivre. Ils traversèrent le champ de pommes de terre pour entrer dans une pièce moissonnée sur la lisière de laquelle étaient des meules de blé. Ils passèrent de manière à ce que les meules fussent entre eux et les uhlans, et là, en un moment, sans presque s’arrêter, une femme ôtant de gros ciseaux de sa ceinture les lui tendit en lui disant de se couper bien vite les moustaches, et « aussi près que possible, » ajouta-t-elle. Il obéit en toute hâte, il n’avait pas encore pensé à ce signe accusateur de sa profession.

Après avoir quitté ces braves gens, et le soir du même jour, il entra plein de confiance en son déguisement dans une auberge écartée, près du village de Signy. Il y était à peine que la salle fut envahie par des coureurs allemands. Le bandage de sa main blessée leur donna des soupçons. Un officier l’interrogea, M. Herbauld vit l’impossibilité de nier sa qualité. On le mit dans une espèce d’écurie avec un planton à sa porte.

Vers dix heures du soir, il essaya de déplacer des bottes de foin qui fermaient un côté de sa prison. Il