Page:Boiteau - Légendes pour les enfants (Hachette 1861).djvu/310

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rougir des haillons sous lesquels elle se montrait à ses yeux, elle alla au-devant d’elle, la salua respectueusement et la conduisit dans son appartement. Par un instinct secret dont elle ne devinait pas la raison, elle se plaisait dans la compagnie des deux enfants ; elle ne pouvait se lasser de les regarder et louait sans cesse leur beauté.

L’heure du festin arrivée, lorsque tout le monde fut à table, le marquis la fit venir, et lui montrant la jeune fille, qui était vêtue avec une éblouissante richesse, il lui demanda ce qu’elle en pensait. « Monseigneur, répondit-elle, vous ne pouviez la choisir plus belle et plus aimable, et, si Dieu exauce les prières que je ferai tous les jours pour vous deux, vous serez heureux ensemble. Mais, de grâce, sire, épargnez-lui les douloureuses blessures qui ont ensanglanté mon cœur. Plus jeune et plus délicatement élevée, elle ne saurait peut-être pas y résister ; elle en mourrait. »

A ces mots, des larmes s’échappèrent des yeux du marquis. Il ne put dissimuler davantage, et, admirant cette douceur inaltérable et cette vertu que rien n’avait pu lasser, il s’écria : « Griselidis, ma chère Griselidis, c’en est trop. J’ai fait, pour éprouver ton amour, plus que jamais homme sous le ciel n’a osé imaginer, et je n’ai trouvé en toi qu’obéissance, tendresse, fidélité. »

Alors il s’approcha de Griselidis qui, modestement