Page:Boiteau - Légendes pour les enfants (Hachette 1861).djvu/319

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les sifflements du vent et les rafales subites jetaient la terreur dans les âmes. Malgré le vent et la pluie, l’air était lourd et on étouffait. Chacun était à la porte de sa maison, attendant le passage du Christ. Isaac Laquedem l’attendait comme tout le monde. Au moment où un éclair plus brillant que les autres venait de déchirer la voûte du ciel, il entendit des cris sauvages et quelques gémissements : c’était le cortége de Jésus qui s’avançait. La figure du Fils de Dieu ruisselait de sang et de sueur ; une poussière épaisse couvrait ses cheveux ; ses mains tremblantes serraient le bois de la croix fatale ; il pliait sous le fardeau, il semblait près de tomber, près d’expirer à chaque pas ; et toutefois il marchait toujours sans murmure, l’oeil plein d’une douceur divine, et rien dans sa douleur n’avait altéré les sources de sa bonté. Il allait passer devant la boutique du cordonnier, lorsque, apercevant devant elle un escabeau, il s’approcha et fit un geste pour indiquer qu’il désirait s’y reposer un instant. Je ne sais quelle férocité soudaine s’empara de l’âme du maître de l’escabeau ; la peur le fit lâche, et la lâcheté cruel : « Lève-toi, dit-il au Christ, et continue à suivre la route jusqu’au gibet, fils de Dieu, Messie, rédempteur des hommes, roi des Juifs. Je ne veux pas que le seuil de ma maison soit souillé aujourd’hui. »

Un centurion qui se trouvait derrière lui fit entendre