Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/24

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reſtée pour cette ſœur au deſſous de l’indifférence.

Notre accueil, au Couvent de ***, fut auſſi glacé qu’il le devoit être. Dans les diſpoſitions où nous étions toutes deux, la néceſſité d’habiter ſous un même toit, nous paroiſſoit également onéreuſe, & nous auroit peut-être rendu implacables l’une pour l’autre, ſans Madame de Saintal, qui depuis un mois s’étoit retirée dans cette maiſon.

Comme fille de ſon ami, & comme objet de l’averſion de ſa mere, la Comteſſe avoit, dès le premier moment, diſtingué ma ſœur de ſes compagnes ; charmée de ſon eſprit, de certaines qualités ſingulieres à ſon âge, elle s’étoit plue à l’étudier, & ſe flattoit de la bien connoître. La ſuite lui prouva qu’elle s’étoit mécomptée, & que les événements pouvoient ſeuls développer un ſemblable caractere.

Jamais, ſans être fauſſe, on ne fut plus cachée. Mademoiſelle d’Aulnai parloit peu, & toujours d’un ton meſuré. Plus véhémente que vive ; plutôt ſombre que ſérieuſe ; aimant paſſionnément le plaiſir ſans être gaie ; ſon humeur, ſa volonté étoient comme un reſſort, dont les forces s’accroiſſoient en proportion de celles qu’on employoit à le comprimer. Aſſez bien du côté de l’extérieur, pour n’avoir point à redouter de con-