Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/58

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tention ſimulée ; ces dehors glacés que je me reprochois ; mais que je jugeois indiſpenſables.

Malgré ces précautions, je ne voyois de sûreté pour mon cœur, qu’en l’attachant d’un autre côté. Trop délicat pour n’être pas difficile, il erroit autour de mille objets ſans ſe fixer à aucun. Enfin, Mademoiſelle de Villeprez me parut aſſez belle pour décider ſon choix… Je crus l’aimer, parce que j’en avois le deſir, & parce qu’à mon âge on ſe méprend aiſément aux impreſſions de la beauté. A peine j’avois fait les premiers pas vers elle, que vous vous liâtes intimement, & qu’elle vous admit à nos plus ſecrets entretiens… Vous me gênâtes ; j’en murmurai ; elle n’en tint compte : cette imprudence fut fatale à l’eſpece de ſentiment qu’elle m’avoit inſpiré… Inſenſiblement je contractai la douce habitude de vous voir, de vous entendre… Chaque jour vous me deveniez plus néceſſaire ; chaque jour les défauts de Mademoiſelle de Villeprez me bleſſoient davantage… Une paſſion véritable s’inſinuoit dans mon ame ſous le nom de l’amitié ; mais toujours frappé des raiſons qui s’oppoſoient à cet amour, je cherchois encore à me le déguiſer quand vous m’éclairâtes ſur le vôtre… Depuis ce moment j’ai été en proie à des tourments