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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/131

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généreux !… Mais… que fait-il ? que devient-il ? Le ſavez-vous ?… Parlez, achevez de détruire ma miſérable exiſtence. Monſieur de Rozane, à qui ma mere n’avoit encore rien communiqué, fit une réponſe indirecte, me ſuppoſant un peu d’aliénation d’eſprit. La Marquiſe ſaiſit ſon idée, la confirma devant mes femmes, qu’elle fit retirer, dès que leur ſecours ne me fut plus néceſſaire.

Voilà une jolie aventure ! me dit-elle, & vous êtes admirable de jouer ainſi la déſolation ſur des malheurs dont vous ne pouvez accuſer que vous !… Dieu ſait quelle ſera la ſuite de tout ceci… Venez, Monſieur, ajouta-t-elle, venez juger à quel point je dois me féliciter d’être mere… Elle me jetta un regard foudroyant, pouſſa bruſquement la porte de mon cabinet, & me laiſſa dans une ſituation preſqu’auſſi difficile à concevoir qu’à décrire.

Quelque foible que je fuſſe encore, je quittai mon lit, ſans l’aide de perſonne. Noyée dans mes pleurs, abymée dans mon humiliation, j’oſois à peine remuer… Toute mon attention ſe portoit vers le lieu où s’inſtruiſoit mon procès… Le plus léger mouvement de mes Juges me glaçoit de frayeur… Ils parurent ; je n’eus pas l’audace de les enviſager ; mais me jettant à