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Canadiennes d’hier

d’admirer notre mère patrie, il doit y avoir encore un peu de place dans votre cœur, sinon pour le Canada, du moins pour notre province de Québec. Il a dû vous arriver quelquefois de remonter le St-Laurent en imagination et de vous laisser porter sur ses ondes jusqu’au paisible cimetière de chez nous.

Et, après toutes vos tribulations, vous devez avoir besoin d’une détente dans le calme de la campagne. Où pourrez-vous la trouver plus complète qu’à St-Jean-Port-Joli, dans la maison de gros’maman Tessier ? Venez donc sans cérémonie, nous vous recevrons de notre mieux ; vous serez portée sur la main. Vous dormirez « dans » le gros lit de plume de la chambre rose, vous savez celui dans lequel on tombe comme dans la crème.

J’espère que l’accent canadien et nos « archaïsmes » (pour ne pas dire plus) ne choqueront pas trop vos oreilles françaises. On ne craint pas vos remarques, on sait que, comme dirait Mme Rivet, les vrais savants sont indulgents, indulgents, indulgents ! D’ailleurs, si vous avez trop de mal à nous comprendre, nous demanderons à mère François-d’Assise et à sœur Bernadette de nous servir d’interprètes.

Je risque cette petite taquinerie pour vous remettre dans l’atmosphère québécoise. Vous pourriez croire que notre mentalité a changé durant votre absence. Il n’en est rien hélas !… ou pas hélas ! En compensation, s’il en est besoin, je peux vous assurer de l’immuabilité de nos sentiments.

Au plaisir de vous revoir, chère mademoiselle

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