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Canadiennes d’hier

trouver la maison de mon père devenue la propriété d’un étranger.

Vous avez compris, chère amie, que je vous écris sous le coup du désappointement. À d’autres qu’à vous je ne parlerais pas aussi librement. Après quatre années d’absence, il faut que je prenne garde à ce que je dis comme si je n’étais pas du terroir car, si mes compatriotes n’ont pas changé, ils sont quelque peu susceptibles.

Il y a une partie de l’héritage de gros’maman que vous ne pensiez peut-être pas recueillir, Régina : celle de confidente de Sylvie Carrière. J’espère me conduire de manière que vous ne soyez pas tentée de renoncer à la succession. Sous votre apaisante influence, après la première émotion du revoir, la minute de silence suivie probablement d’un flot de paroles (je me connais), je suis sûre de recouvrer mon équanimité.

À bientôt donc, chère amie, mes chers amis, je vous avertirai par carte postale illustrée (« château Ramezay », je la tiens prête à partir) du jour et de l’heure de mon arrivée. Il ne faudra pas venir me chercher au train : une vieille citoyenne de St-Jean-Port-Joli telle que moi doit être capable de s’y retrouver seule.

Sylvie

Mme Daniel Robichaud à Mlle Sylvie Carrière
St-Jean-Port-Joli, 20 juin 1920
Mademoiselle,

Quand on vous a présenté Mme Daniel Robichaud, hier, chez Mme Tessier, j’ai bien vu que

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